Découvrez les mécanismes d’écriture d’une nouvelle noire en 21 jours

Une nouvelle policière se déclenche comme un récit craché dans la panique. Elle se découpe en séquences rapides. C’est intense, soudain. Séquençage de 21 jours à suivre ici

Au sortir d’un hiver épuisant, j’accueille la lutte du printemps avec enthousiasme. Je réponds au concours de nouvelles « Quais du Polar » 2021. 21 jours pour écrire une nouvelle noire à vos côtés, et pour en découvrir les mécanismes de narration. Je sors à peine de « L’Affaire Roundup », étrangement similaire à l’affaire du virus actuelle. Alors, un concours de nouvelle noire sur le thème « nature et environnement, terrain de jeu du crime ? » Ça ne se refuse pas. Suivez le guide !

D’abord, nous savons tous raconter des histoires sous forme de scénarios

pièce bitcoin
Fiction et Réalité sont les deux faces d’une même pièce - Photo de Tumisu

D’abord, j’ai l’impression d’extirper une scène d’un scénario. J’en crée un nouveau. Oui, j’écris à partir d’un scénario déjà vécu. Vous comprenez ? Raconter et inventer sont deux processus qui se confondent. On raconte ce qu’on invente. Et, même quand on n’invente pas ce qu’on raconte, on invente ce qu’on raconte. Ce que je veux dire, c’est que l’imagination ne fonctionne qu’en étroite relation avec la réalité. Donc, fiction et réalité ne sont que les deux faces d’une même pièce. Ok, dit comme ça… je veux dire que, pour raconter une histoire du style « tu ne croiras jamais ce qui m’est arrivé », l’invention de « l’histoire vraie » commence.

Ensuite, nous savons qu’il faut rythmer son récit pour capter l’auditoire

fenêtre sur l'horreur
Je dessine des fenêtres pour voir à travers - Syaibatul Hamdi

Pour moi,  une nouvelle noire est un monde de suspense tiré d’un monde plus complexe. Cette nouvelle policière de 6 pages se déclenche comme un récit craché dans la panique, une histoire dans l’histoire. C’est intense, soudain. Elle se découpe en séquences rapides. Ces séquences s’imbriquent les unes aux autres pour en restituer toute l’horreur, toute l’absurdité, et tout l’espoir d’avoir survécu au récit. Concrètement, comment j’écris cette nouvelle en 21 jours pour le concours « Quais du Polar » ? J’écris des scènes qui n’ont ni queue, ni tête, je les griffonne aussi sûrement que je dessinerais des fenêtres pour voir à travers, et pour découvrir l’intimité du monde que j’invente.

En amont, nous témoignons des mécanismes de notre propre monde

famille masquée
« Nature et environnement : nouveaux terrains de jeux du crime ? » Photo de Mohamed Hassan

Après « L’affaire Roundup à la lumière des monsanto paper’s », je continue la lecture de « Un empoisonnement universel » de Fabrice Nicolino, que j’alterne avec « La biologie des croyances » de Bruce Lipton — une « histoire » plus joyeuse. Bon an, mal an, je plonge comme je peux dans l’univers des scientifiques, lorsque je tombe sur le thème du concours  « Quais du Polar » 2021. Comme je suis en plein dedans, me dis-je, autant me lancer ! Lectures de circonstance. C’est l’occasion de faire une reconstitution fictionnelle de notre réalité terre à terre qu’on prend en pleine face depuis le confinement du printemps dernier, en mars 2020.

Enfin, nous choisissons de reconstituer la scène dans toute sa vérité

poison chimique
"Histoire vraie" d'un emprisonnement universel - Photo d'Adrian Malec

« Nature et environnement : nouveaux terrains de jeux du crime ? » Mes lectures du moment (qui ont eu raison de mon moral au sortir de l’hiver) me conduisent naturellement à répondre au thème avec enthousiasme. Car, la fiction a pour moi le pouvoir de me rééquilibrer les chakras. Je vous entraîne donc dans l’invention d’une histoire  tirée de mes lectures. Et, celles-ci n’ont rien d’une fiction. Ce sont des contes estampillés « histoires vraies » ou (attention ça devient subversif) « enquêtes journalistiques ». Il est vrai que j’aime autant écrire des fictions que décortiquer la manière dont les idées me viennent pour nourrir l’écriture en cours. À SUIVRE

Écrire une nouvelle noire en 21 jours #3

3ème jour. Reste 19 jours pour publier ma nouvelle pour le concours « Quais du Polar ». Alors, comment se passe l’écriture de cette nouvelle noire ? Cliquez ici pour le découvrir

Alors, comment se passe l’écriture de cette nouvelle policière ? Suivez l’écriture d’une nouvelle noire pour le Concours « Quais du Polar » – 3ème jour. Reste 19 jours. Frémir, c’est ce qu’on recherche dans une nouvelle noire. Mon objectif est d’écrire ce que j’aimerais lire. Pas facile lorsqu’on sait qu’on le saura une fois lu, et donc une fois écrit. 

J’imagine la personnalité de mon héroïne en inventant de « faux » dialogues

Comme une bribe de dialogue

C’est comme si mon personnage s’invente de fausses histoires sur sa vie. Pour rigoler, se libérer, se décharger des tensions. J’ai déjà observé ma fille, réinventant des dialogues vécus pendant sa journée d’école. Je fais pareil. Soledad fait pareil… Soledad. Son nom est donc apparu au cours d’une fausse scène — comme un fragment de dialogue entendu dans la rue. Soledad est donc mon héroïne. Elle ne dira rien. « On » ne sait pas de quoi elle est capable. Effacée, elle ne prend pas parti. Soledad cherche tout de même à prévenir son patron qu’il risque de se faire buter. Ce n’est pas rien, mais ça assoit une nouvelle policière, évidemment. En plus, ça barde à la maison. Forcément, puisque Soledad bosse désormais avec l’ennemi déclaré : Rinaldi Serrar.

Librement inspiré d’une « histoire vraie »

Quand je vois cet avertissement dans les premières secondes d’une projection, « tiré d’une histoire vraie », un frisson me parcourt, pas vous ? Dans la vraie vie, Rinaldi Serra vient de sortir un bouquin. Dans la vraie vie, Rinaldi Serra s’appelle Séralini. Pendant ces 19 prochains jours, je vais expérimenter avec vous le pouvoir de la fiction. Sa fonction et, peut-être même, sa puissance. Ce chercheur est visé à la lunette. Taxé d’excentrique, accusé d’activisme et, finalement, de fraude passible d’une mise à pied immédiate, Rinaldi Serra ira-t-il jusqu’à « foutre sa carrière en l’air » ? Si oui, en sortira-t-il vivant ? Soledad, elle, sait ce qu’« ils » lui réservent s’il ne plie pas sous les pressions.

Caricature provocatrice pour ouvrir le dialogue et apprivoiser la bête

Soledad, raboule ta fraise, morveuse ! C’est toi qu’a fermé l’entrepôt, hier ?

— Non, j’étais au labo. C’est Conrad qui devait s’en charger, je crois.

— Putain de conard, celui-là ! Il a dit à Abdel que c’était toi, l’enfoiré ! Il nous fout tous dans la merde. Les cuves ont disparu.

J’écris ainsi des bouts de dialogues, risibles, bribes décalées de la réalité. La vérité de ce personnage naissant qu’est Soledad. Ça me défoule, ça brise la glace entre Soledad et moi. Je la caricature, et j’en ris avec elle. Elle, qui sait tout, et qui cherche à rester neutre. Forcément, ça la rend nerveuse, c’est le but du jeu. Soledad appartient à une famille de chimistes. De grands passionnés qui, comme nous tous, pensent à la sécurité de la Famille et de l’Entreprise.

J’explore l’environnement de mon personnage et ses mécanismes de croyance

Je m’identifie à une famille de criminels

Ils ont deux familles. Les découvertes et brevets d’un côté, la commercialisation et les débouchés de l’autre, deux familles indivisibles. C’est comme dans la mafia, j’imagine, l’un ne va pas sans l’autre. Pour conquérir le monde, il faut être Dieu et Juge. Personne ne coupe le lien entre business et famille. Soledad y parvient pourtant. Ce n’est qu’une question de temps avant d’y être mêlée. Ce jour était arrivé. Au sein de « l’entreprise », même si les chimistes jouissent d’un prestige immense, ils sont là pour trouver des solutions qui se vendent. Comment la criminalité s’organise-t-elle en système ? D’abord, qu’est-ce que la criminalité ? Le crime en est un atout, la loyauté aussi. Le réseau, l’imbrication des rôles et l’appartenance filiale forment le socle d’une organisation criminelle. Comme toute organisation, finalement.

J’établis un barème des responsabilités

Alors, c’est quoi la différence entre la bonne et la mauvaise organisation ? La différence, me dis-je en mettant du linge sale à la machine, c’est les conséquences de mes actes. Elles semblent dérisoires, comparées à celles qui menacent directement la biosphère terrestre. Quand même ! J’avoue que mon besoin de faire vite, pour économiser du temps et de l’énergie à moindre coût, surgit relativement souvent. Aucune spirituelle responsabilité ne m’habite à ces moments-là, je le confesse. Pas plus tard qu’hier, je balançais dans la machine à laver des fringues inadaptés à 40°, sous prétexte d’aller plus vite à moindre effort. J’ai éprouvé le besoin de bâcler la tâche. Nul désir de nuire, et pourtant ! Voilà peut-être ce qui arrive aux équipes de Tomason (anagramme de Monsanto) !

J’étudie différents angles de vue, différents mythes

Contrairement aux conséquences de mon lavage à 40°, l’usage intensif et mondial d’un pesticide mortel, menace directement la biosphère. Le plus étrange, c’est qu’un chimiste est méticuleux, car extrêmement conscient des conséquences de ses actes. C’est l’angle de vue qui change. La psychologie du « responsable » est difficile à comprendre si on ne change pas d’angle. Tous autant qu’on est, pour aller plus vite, pour entrer dans un budget, on fait des entorses à la prudence et au bien commun. L’édification du système à entorses s’opère chez tous, je pense. D’accord, alors comment s’érige-t-il en bande organisée ? Beaucoup apportent des réponses. Pour moi, Séralini apporte celle qui se déroule, comme un fil rouge, pour comprendre la situation dans laquelle nous errons actuellement. Les monstres naissent quand on rebat les cartes, à des moments historiques. Ils naissent tous pareils, en sauveurs.

Un personnage est fait de vérités

Lorsqu’elle était enfant, Soledad avait une vision plus glamour de ses frères. Aujourd’hui, ils ont peu de scrupules à lui balancer leurs résultats recherches. Avec eux, les conséquences. Qu’importe, puisque leur responsabilité est ailleurs ! « La vérité » se noie dans une propagande permanente. « L’avantage d’appartenir à la matrice, c’est qu’elle roule pour toi ! » lance le frangin.  C’est du travail d’équipe. On se sert les coudes de très prêt. De tellement prêt qu’on ne les desserre jamais. Au final, nous sommes tous logés à la même enseigne face à nos responsabilités. Quand il s’agit de réfléchir aux conséquences indirectes de nos actes, nous verrons cela plus tard… « Ces mecs-là [l’entreprise] brassent des milliards, me dit un jour mon père. Crois-tu qu’ils s’embarrassent de tes objections ? Leur job, c’est de les écraser.»

Demain, on continue d’avancer

 Une nouvelle noire en 21 jours

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