Le roman fantastique à l’épreuve du devoir de philo

L’auteur de roman fantastique doit-il faire ses devoirs de philo ? C’est avec beaucoup de résistance qu’il aborde la technique éprouvée du plan : problématique, thèse, hypothèse. C’est en explorant le pouvoir de l’intuition qu’il découvre la puissance autodestructrice de son esprit cartésien

L’écriture du roman fantastique à l’épreuve du plan : problématique et enjeu

la résistance au plan
l'écrivain fantastique peut-il faire l'économie de l'exigence implacable de son devoir de philo ?

La résistance au plan

Salut tout le monde ! Je suis en pleine phase de résistance. Certains écrivains se sentent plus en phase en déroulant les pages de leur futur bouquin, s’assignant même un nombre de mots obligatoire par jour, tandis que d’autres ne démarrent l’écriture qu’une fois leur plan établi. Moi, je balance entre les deux. Depuis que je « travaille » l’ossature de mon premier épisode, j’ai l’impression sordide de sortir de l’univers de mon roman. Où sont passés mes personnages ? Leurs actions ne se résument qu’à des fiches stériles que je ne parviens pas à faire exister dans ma tête. À contrario, j’aime la sensation d’immersion dans leur vie lorsque, chaque matin, je tisse un lien avec mes personnages, en allant les retrouver quotidiennement sans tout calculer à l’avance. Je les approche, je les devine, je suis comme une espionne qui les observe et les analyse. Avec ma nouvelle tactique d’approche, je ne me sens pas dans mon élément, c’est indubitable.

L’exigence de structure

Quand je dis « travailler »(le plan) entre guillemets, c’est parce que je bricole. Ma tête n’est pas habituée à penser en terme de structure, quand bien d’autres se sentiraient perdus s’ils accumulaient de la matière sans pouvoir l’ordonner dans un cadre préétabli. À la réflexion, ne suis-je pas en plein vagabondage intellectuel, justement ? Je sais que certains écrivains écrivent au fil de l’eau et que ça ne les empêche pas d’achever leur manuscrit. Et puis, je sais surtout que mes deux premiers bouquins « manquent de structure« . Même si je suis contente du résultat, je ne suis pas dupe. L’inspiration seule ne mène pas à l’excellence, et encore moins au best-seller recherché ici. Peut-être n’y parviendrai-je jamais. Mais, encore faut-il tenter le coup ! Alors, oui, je vais m’accrocher et continuer ces « fiches-actions » et « fiches portraits » qui s’abattent sur les murs de ma chambre, punaisés comme dans une mauvaise série policière.

L’ordre atteint son but

Les murs sont envahis de post-it et de caractères manuscrits qui ne me parlent pas. J’ai aussi tracé une longue ligne au feutre noir pour faire office de chronologie. Pour l’instant, je n’y ressens nulle vie et ça ne m’éclaire pas. Plus je colle et punaise ces mots, moins ça me rassure, et plus je m’éloigne de mon but. C’est à n’y rien comprendre. Mon cerveau serait-il en rébellion contre ma tentative d’ordonner ses idées ? Je ne vais pas me laisser faire. Une amie m’a envoyé une technique de plan qu’elle utilise depuis ses années de fac de philo. J’ai beaucoup d’estime pour son travail. Directrice de publication, elle est suffisamment calée pour que je prenne son document de trois pages au sérieux. Il m’apparaît si obscure que j’en ai mal au crâne. Je ne me démonte pas et commence à le décortiquer point par point. Et, ô miracle, il me parle. Je vous partagerai ici les deux premiers points. Le troisième nécessitant un temps de réflexion pour mon prochain article.

Les  pouvoirs intuitifs enfermés dans l’esprit cartésien : thèse et hypothèse

mental et intuition
le pouvoir de l'intuition n'est-il qu'une affabulation de l'esprit ?

L’enjeu de nos pouvoirs

Premier point : définition du problème et de son enjeu. Ça, c’est facile. Le problème est le suivant : Cécile s’aperçoit que son enfant a des pouvoirs (d’ailleurs, ce n’est pas très développé pour l’instant). Tiens, si je me focalisais sur ce sujet central ces prochains jours ? Mon plan serait peut-être plus facile à monter. L’enjeu est de cacher les conséquences de cette révélation au commun des mortels ou, du moins, d’en maîtriser l’impact. Deuxième point : construction de la problématique (thème, thèse, problématique). Là, j’ai du mal à comprendre. Serais-je butée, voire irrécupérable ? Disons que je suis face à ma plus grosse lacune : la construction. Bah, oui, c’est bien ça. Je me suis même aperçue récemment que j’avais du mal à viser un résultat, pour tout, en fait. Allez, ça se corse mais je m’engouffre dans la faille. Même pas peur, je me lance ! Mon thème entre dans le registre du fantastique mais pas dans le genre monstres et compagnie. Car, pourquoi inventer du fabuleux quand la réalité en produit déjà ? Je veux au contraire le révéler.

La thèse du pouvoir intuitif

Je veux étudier la réalité de nos pouvoirs intuitifs. S’ils existent vraiment, pourquoi n’apprenons-nous pas à nous en servir ? Je pense que c’est une longue histoire. C’est mon thème, assurément. Et, ma thèse, quelle est-elle ? Disons que, dans l’absolu, nous avons tous la capacité de développer notre pouvoir intuitif, selon notre éducation, notre apprentissage, les circonstances de notre vie et le développement de notre personnalité. Je définirais ce pouvoir intuitif comme une connexion à soi-même poussée à l’extrême, passant les limites de notre intellect et perçant les frontières de notre mental. Il nous permettrait alors de capter des informations. Ou, plutôt, d’être l’information elle-même ! Menant à la télépathie et autres aberrations surnaturelles pour nos pauvres esprits cartésiens. Je vous partage à ce sujet une référence que j’estime digne de foi. J’appelle Corinne Sombrun à la barre (voir la vidéo en fin d’article). J’ai lu tous ses bouquins et j’aime son retour d’expérience.

La question du refoulement

Mais, reprenons le plan. J’ai donc à formuler ma problématique. Où est le problème à résoudre ? Je dois réduire ma question à sa plus simple expression : comment développer son pouvoir intuitif dans une culture éducative enfermée dans l’intellectualisme pur ? Vaste question qui ne définit pas assez le problème traité dans mon roman : les pouvoirs de Line sont inconnus, rejetés et considérés comme nuisibles (car exprimés). Cécile, sa mère, a elle aussi des pouvoirs, mais elle a su les refouler étant enfant. Comme nous avons tous appris à le faire. La souffrance qu’on s’inflige ainsi est le problème. Comment le résoudre ?  En apprenant à accepter nos capacités intuitives, à en faire une force, à s’en servir. Comment ? C’est toute la démonstration que j’ai prévu de développer dans ce roman intitulé « Le Projet Line« . Line deviendrait une source d’inspiration pour le lecteur.

L’hypothèse de l’auto-destruction

Le troisième point demande réflexion : redéfinition de l’énoncé. Okay mais, c’est quoi mon énoncé ? Nous aurions une capacité intuitive dont nous ne concevons pas la puissance. Refoulée, coupée du champ informationnel, elle dérive, et nous nous en détournons, nous déformons les informations auxquelles nous serions naturellement reliés. Résultat, nous apprenons très jeunes à nous détourner de nous-mêmes et alimentons une opposition intérieure qui mène à l’auto-destruction programmée. Redéfinir l’énoncé devrait conduire à émettre une hypothèse de sortie de crise, non ? Une sorte de réveil intérieur ? Mais, pour parvenir à quoi ? Pour aller où ? Vers un nouveau rapport au monde ? Ça manque de substance. Le point positif est de s’en apercevoir. Je me posais encore la question quand un ami me parle de l’infirmière de Roswell. Et là, un nouvel horizon se présente à moi. Affaire à suivre…

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Rédiger le premier épisode du Projet Line en 3 mois

Je comparerais volontiers le romancier à un cartographe car j’ai constamment l’impression de sillonner un univers préexistant à mon arrivée. Et, je suis en charge de le restituer sur une carte. Mais, il peut devenir chorégraphe ou metteur en scène.

Premièrement, rédiger la scène d’ouverture

l'identité culinaire du roman - Photo de Pexels

Inventer une super-héroïne qui rivalise avec les géants américains...

Ça vous tente ?
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Serai-je prête à Noël pour rédiger ce premier épisode ?

J’ai rédigé une ouverture du roman avec Élise, la nourrice. C’est une bonne idée car Élise est un personnage qui doit éveiller de l’inquiétude chez le lecteur. En l’état, ma scène d’ouverture ne tranche pas dans le vif. Elle risque de faire fuir le lecteur. Ça peut marcher si j’arrive à susciter une certaine angoisse, à générer une alarme et de l’ambiguïté. J’ai rédigé son arrivée à Saint Jean de Luz. Je pourrais ensuite présenter Cécile et Antoine. Puis, revenir sur Élise qui sonnera chez ses nouveaux employeurs. Le lecteur se sentira alors inquiet pour la famille qui fait entrer un serpent dans la maison. Pour rédiger la scène d’ouverture, je dois élargir le spectre des questions.

Pourquoi la scène d’ouverture me préoccupe-t-elle autant dans la rédaction de mon plan ?

Un roman est un univers cohérent, un système de valeurs. Pour créer cette cohérence de valeurs, incarnées par les personnages, je rédige une première chronologie, quitte à la remanier par la suite. J’affinerai ensuite les actions et les portraits grâce à une nébuleuse de questions que j’ai posées en cours d’écriture. Par exemple, pour Élise, j’ai encore beaucoup d’éléments à rédiger. Si elle représente un danger pour Line, elle devrait susciter une réelle inquiétude chez le lecteur dès les premières lignes. Rédiger la scène d’ouverture pose les questions essentielles qui permet de rédiger le plan général. Comment et pourquoi Élise trouve sa place au sein de la famille ? Voilà une question qui interroge la cohérence générale du roman.

Pourquoi  je rédige le portrait d’un personnage clé qui ouvrira la porte de l’univers ?

Je note une seule question qui devra articuler l’épisode entier, et je décris un seul personnage pour l’incarner. Élise a des compétences rares, une intelligence éducative qui la rend précieuse. C’est un outil tranchant; elle est à la fois dangereuse et indispensable. Pour la mettre en scène d’ouverture, je dois comprendre pourquoi et comment elle se rend indispensable, pour la famille et pour le roman. Elle inculque quelque chose d’essentiel à Line. C’est un élément fondateur car l’histoire du comportement de Line s’explique à travers l’éducation qu’elle reçoit. Pour écrire le comportement d’un personnage, il faut partir de son désir. Comprendre quelqu’un c’est comprendre son désir. Ce dernier se construit en fonction de l’histoire qu’il se raconte.

Deuxièmement, inventer le désir de chaque personnage principal

Élise, l'incarnation du trouble

Rendre l'aventure fantastique...

Tu me suis, là ?
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Comment le désir personnel fait écho à celui des autres personnages ?

Ce qui rend une personne compréhensible, c’est son désir. Le désir est à la base de toute action, de toute vie. C’est à lui qu’on fait appel pour avancer, pour vivre et survivre, pour tout, en fait. Celui d’Élise est de servir la volonté de Dieu. La nourrice ne reculera devant rien pour être à la hauteur de la mission divine dont elle est investie : façonner l’homme en instrument de Dieu, former de grands hommes ! Ceci étant posé, la question cohérente est : que désire la famille pour l’éducation de Line ? Et, comment Élise peut-elle incarner deux facettes opposées sans se faire virer ? Elle changera de poste qui l’entraînera sur une mission encore plus dingue.

Comment inventer l’évolution d’un personnage en réponse à son désir ?

Élise deviendra-t-elle un fléau ? Mystère. Je sais pourtant que les déviances d’Élise ne passeront pas inaperçues. La nourrice ne peut être congédiée pour des questions de confidentialité, et se retrouvera coincée au service des d’Haranguier. Elle en éprouvera un profond ressentiment, ce qui n’est pas en cohérence avec ses valeurs. Il lui faudra donc sublimer ce sentiment en se donnant une mission plus haute. Sauver le monde de ce diable de Line ? Je ne sais pas jusqu’où Élise ira, mais je compte sur elle pour pimenter le jeu de l’intrigue. Je rappelle aux nouveaux lecteurs que la dévotion malsaine d’Élise est une invention d’Anton, mon fils avec qui j’ai commencé la rédaction du Projet Line (j’écris un roman en 3 mois avec mon fils).

Comment chorégraphier cette danse de désirs ?

Je comparerais le romancier à un cartographe plutôt qu’à un chorégraphe. J’ai constamment l’impression de sillonner un univers préexistant à mon arrivée. Et, je suis en charge de le retranscrire sur une carte. Cet univers est mesurable et à portée de découvertes, de représentations et de schématisations. Mais, il est vrai que, comme pour une danse, le rôle et la place de chacun est à mesurer au centimètre près. Qu’est-ce qui fait qu’Élise a sa place dans la famille et dans la suite de l’histoire, pour rendre cet univers (ou cette danse) cohérent ? La cohérence de ses valeurs joue avec celle des autres. On ne rédige pas un portrait sans prendre en compte tous les autres. Les costumes doivent se répondre.

Troisièmement, rédiger toutes les questions émanant de ma ronde de portraits

Diapositive précédente
Diapositive suivante

Pourquoi j’écris des scènes d’action avant de rédiger ma galerie de portraits ?

Je sais, c’est mal.  Au lieu de faire la rédaction de mon plan, je plonge dans un univers inconnu. J’annonce une échéance impossible à tenir dans cet ordre de marche. Au bout de 12 mois, je n’ai toujours pas rédigé de plan. Ouais, c’est très mal. N’empêche, même repoussées, les échéances de 3 mois, ça motive. Pourquoi rédiger dans cet ordre ? Pour m’imposer une dynamique d’écriture. Je rédige ensuite mes portraits en fonction d’une liste de questions directement tirées de mes scènes d’action. Maintenant, je peux écrire mon plan à partir d’une grille de questions propres au roman en cours, et rédiger ma chronologie d’actions. Je m’appuie sur une grille de portraits des acteurs principaux en action.

Pourquoi je parle d’acteurs après avoir parlé de personnages et de portraits ?

Ça correspond au ton de mon expérimentation actuelle. Pour ce roman, je me suis fixée deux objectifs : rédiger un plan et travailler l’écriture scénaristique. D’ailleurs, les lecteurs ont bien remarqué la dynamique d’action et le manque criant de descriptions dans la rédaction du premier jet. C’est une démarche sentie, puis conscientisée. Pour moi, cette conscientisation de l’écriture fait partie du travail d’élaboration du roman. J’y tiens, même si c’est long, fastidieux, en dehors des clous, en apparence. C’est aussi une question d’époque. Aujourd’hui, nous vivons l’image, nous respirons l’écran, et nous pensons scéniquement. Malheureusement, nous jouons à la création sans apprendre à nous en amuser. « S’amuser à jouer au créateur qui joue à créer », comme dirait Sidonie Bergot qui transmet cette notion dans ses ateliers

Est-ce que je me prends pour un metteur en scène de roman ?

Carrément ! Je convie mes acteurs principaux pour rédiger mon plan : la chronologie d’actions comme ligne d’appui, et la grille de lecture qui interconnecte tous les rôles entre eux. Rédiger les scènes d’action c’est constituer le squelette d’un organisme complexe (le roman). Disons que cet organisme vivant a un système de valeurs cohérent constitué de cellules (les acteurs), et chaque cellule a un rôle, une fonction déterminée pour faire vivre cet organisme (l’univers romanesque). Mes acteurs principaux sont mes cellules les plus précieuses. Interconnectés, ils amorcent l’action, en interaction avec les acteurs secondaires directement liés à eux et à l’intrigue principale. C’est la forme de la toile d’araignée, avec Line au centre.

La semaine prochaine, je vous partagerai mes techniques de création : un mur, des fiches cartonnées et des punaises pour rédiger notre premier épisode !

C'est quoi son nom, déjà ?

LINE D'HARANGUIER
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Une intrigue secondaire est un chemin qui mène à la question centrale du roman.

L’histoire de Cécile et Henry est une intrigue secondaire qui joue des coudes pour prendre sa place dans la trame principale du Projet Line.

Là, je bloque. L’histoire de Cécile et Henry est une intrigue secondaire qui joue des coudes pour prendre sa place dans la trame principale du Projet Line. Nous ne sommes qu’au début du roman alors que j’imagine déjà Cécile et ses complices fomenter un coup tordu contre ce personnage patibulaire de Likun. Si je me laisse déborder par cette intrigue passionnante, j’aurai peut-être du mal à l’imbriquer dans le premier épisode. C’est le  genre de scrupule qui aide à se poser les bonnes questions : où, quand, et comment finira donc cette intrigue ?

Les questions sont des chemins dont la destination n’est pas la réponse

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"Le lecteur doit toujours retourner sur la route principale."
route
"Comment positionner les acteurs principaux ?"

Le roman est un maillage de routes à parcourir : où, pour où, pourquoi, et comment ?

Je vais laisser décanter cette affaire pour revenir à l’intention qui sous-tend le roman : déterminer la nature des superpouvoirs de Line. C’est, en quelque sorte, une recherche sur le pouvoir de la nature qui nous constituent. Dans un roman, le lecteur doit toujours retourner sur la route principale. C’est tout l’intérêt de la structuration du roman : comment relier les routes secondaires à l’axe central ? Et, comment s’assurer que leur parcours enrichisse l’exploration ? Cécile ne doit pas prendre la vedette, nous sommes bien d’accord, et ce n’est pas mon intention. Mais, Line n’a que deux mois, elle ne peut animer les dialogues ou poser un diagnostique. Alors, je perçois l’enjeu de ce début de roman : instiller l’idée que le « cas Line » est créé de toutes pièces par son entourage. Question : comment positionner les acteurs principaux qui façonnent notre héroïne aux premières années de sa vie ?

Ces questions sont les feux de route qui éclairent l’explorateur

La fin de mon roman apportera LA question et annoncera le début de la véritable aventure. Pour commencer, je pose l’enjeu de la création d’un individu social. Comment devenons-nous le produit de notre entourage et du système qui le conditionne ? Si je me suis engagée dans cette intrigue secondaire (voir les deux épisodes précédents), c’est pour apporter des éléments de réponse dans le registre du fantastique. Mon postulat : considérée comme une enfant perturbée, voire «  malade », Cécile a appris à réprimer ses pouvoirs. En définitive, Cécile devient ma clé d’entrée pour parler de l’origine des superpouvoirs de sa fille, Line. J’explore ainsi les questions de déviance enfantine, de normalité et de moulage éducatif. J’ai déjà écrit quelques scènes où elle est envoyée au Japon à l’adolescence. C’est là-bas qu’elle apprendra à maîtriser ses « problèmes », avec un vieil ami de son père : Shiito. Vous savez, les histoires de super-héros me fascinent. Ils abordent la question du jugement et du préjugé qui nous enferment dans des cases. Maintenant, je m’interroge encore : quelle véritable question émerge de ce parcours ?

superpouvoirs
le registre des questions souterraines : les histoires de super-héros

Comment devenons-nous un super-héros ?

C’est ça la vraie question. Un super-héros obéit à des lois, comme tout le monde (voir les 7 lois spirituelles du super-héros de Deepak Chopra) Ces lois traduisent les « déviances » traitées par les normes de la société, ce qui alimente l’absurde et réprimande la liberté de penser. À ce propos, j’aimerais vous partager la vidéo d’un personnage singulier qui parle de la mise en case : Sébastien Villalba. Il va publier un bouquin qui promet de décortiquer la mode du « pervers narcissique ». Se qualifier à travers des cases pose le postulat suivant : nous sommes sensés nous définir et répondre à des attentes. Aujourd’hui, les cases de la psychiatrie ont fini par s’imposer communément. J’opte pour en sortir.

Mais, dans le registre des questions souterraines, la véritable question demeure face aux lois : comment assumer sa propre liberté ? N’est-ce pas l’enjeu central pour tout à chacun ? Comment ? Par le jeu, bien sûr ! Nous avons aujourd’hui accès à une banque de connaissances infinie, profitons-en ! Expérimentons les techniques d’auto-détermination actuellement transmises.

Chaque question traversée dessine la réalité du parcours, et les routes se construisent à mesure qu’on les foule

mur
"ce subtil travail de construction pour atteindre un équilibre "

Parcourir le chemin de la responsabilisation

Sadguru propose actuellement une session de formation pour apprendre à utiliser notre système corps-esprit-énergie. Nous disposons d’une technologie vivante que nous pouvons apprendre à utiliser POUR nous et non CONTRE nous-mêmes. Le but étant de gagner en lucidité. Bingo ! Au moment où j’écris ces lignes, je découvre une session de formation proposée par Sadhguru et, bien sûr, je m’y inscris immédiatement. Vous pouvez en faire autant, on pourra échanger à ce propos si le cœur vous en dit. J’écoute Sahdguru sur youtube depuis un an environ, et je m’en inspire pour créer les personnages qui soutiendront ma super-héroïne dans son élévation spirituelle. Perso, j’utilise ses conseils pour mes exercices du matin et j’aimais l’écouter pour apaiser mon esprit. Il accompagne ce subtil travail de construction pour atteindre un équilibre fondé la responsabilisation consciente. Se sentir entièrement responsable de nos pensées, de nos actes, de nos relations aux autres et de notre bien-être, c’est le propre du super-héros.

Mon intrigue secondaire soumet nos jugements à l’épreuve de la normalisation

Mais revenons à Cécile. Elle sera donc mon élément clé pour dérouler le sujet passionnant de la « déviance » sociale tout au long du roman. Je rappelle que le super-héros est le réceptacle de nos jugements liés aux attributs de la normalité. Bon, ceci étant dit, une intrigue secondaire doit avoir un début et une fin, prétexte à enrichir le sujet central du roman. Le « don » ou le « pouvoir » d’un super-héros est nié par la société. Notre personnage doté de superpouvoirs doit donc transformer le « problème » en solution. Son premier réflexe est d’adhérer aux normes imposées, puis de se rendre compte que s’il apprend à utiliser son pouvoir pour enrichir les autres, il doit changer d’angle de vue. On arrive au « parcours du héros ». Un cheminement psychologique qui demande d’assumer son potentiel. S’il construit son équilibre intérieur, il accède à la responsabilité de ce potentiel qui, par cette force autonome, perd sa dangerosité pour soi et les autres.

imbrication

L’écriture d’un roman est une technique de maillage

Pour l’instant, je ne sais pas comment l’histoire de Cécile et Henry va s’imbriquer dans le premier épisode du Projet Line. Je ne sais donc pas comment elle prendra fin, ni même quelle conséquence elle aura dans la suite de l’histoire. Pour le savoir, c’est comme dans la vie : un pas devant l’autre et on réfléchit à chaque pause. Pour imbriquer les deux intrigues, deux questions s’imposent : comment évolue l’affaire et comment évolue le cas Line ? Cécile n’est pas seule. Entre la nourrice, la nounou américaine, les employés dévoués et le reste de la famille, Cécile n’est pas le pilier de l’histoire. Line, même bébé, peut guider le lecteur sans sa mère. Je retourne en arrière dans mes écrits et je m’aperçois que je prévoyais déjà la rencontre avec Henry. C’est fou de constater que le fil du récit se tisse un jour après l’autre, et que j’oublie tranquillement son existence…

Le romancier peut associer la discipline du tisserand à la liberté du créateur

grillage support de création
la grille est un support de création : limites et sorties en continuelle imbrication

La discipline quotidienne du tisseur d’histoires

L’esprit est bien fait, faisons-lui confiance. Des fois, je me dis que nous sommes des tisseurs d’aventures. Comme l’araignée, nous fabriquons des fils tellement solides et transparents qu’on peut être sûr qu’une fois tissés, ils restent en place et supportent notre construction. C’est pourquoi je crois en la constance dans l’écriture, et j’affirme qu’une séance quotidienne est le pilier fondateur de l’écriture d’un roman. Apprendre à être libre dans ses séances est tout aussi essentiel que d’en faire une discipline. Je m’explique : toutes les scènes que j’écris depuis des mois ne suivent pas la chronologie. Un jour Line a deux ans, un autre elle en a quinze ! Pourquoi ? Pour deux raisons. D’une, je cherche toujours à respecter l’impératif de liberté intuitive propre à cet exercice d’écriture quotidien. Démarrer le matin en étant libre d’écrire ce que je veux comme je veux fait partie du deal. De deux, je m’impose cette année d’écrire un plan du roman. Avec cette méthode non chronologique, je suis parvenue à une vision générale de ce plan, explorant l’univers de mon héroïne par morceaux, sautant allégrement les années selon mes envies.

plan du roman
Plan du Projet Line - ébauche d'une chronologie
mots auto-suggestion

La patience d’ange des créateurs d’univers

J’ai ainsi ébauché un plan, inventé des personnages qui ne sont pas encore arrivés pour ce premier épisode. Et, heureusement ! Car, si je publie le premier épisode à Noël, je dois être capable de le relier à l’ensemble à venir (honnêtement, je me donne deux ans pour écrire ce roman : no stress). Ainsi, j’ai tout loisir de ménager le suspense, d’introduire des éléments dont le lecteur comprendra plus tard les implications (comme c’est déjà le cas pour notre ami Henry). Maintenant, j’aimerais attaquer les recherches. C’est passionnant mais énergivore. J’ai un peu peur de m’y laisser engloutir et de m’éloigner du ronron des séances. Perspective inquiétante mais riche ! Inventer des superpouvoirs, c’est se coller aux avancées scientifiques et aux lectures ardues. Pour l’instant, j’avoue ne pas avoir trouvé le fil sur lequel tirer, et dont tout découlerait. J’ai déjà tiré des scènes intéressantes de mes précédentes tentative mais, elles restent anecdotiques. Ces recherches devront me permettre d’élaborer un système cohérent pour expliquer les pouvoirs de mes héroïnes, en rapport avec la réalité de nos propres capacités extra-sensorielles. Affaire à suivre…