Comment écrire une fiction tirée du récit de Séralini : « L’Affaire Roundup […] » ?

Face aux lobbys de l’industrie chimique, Séralini n’avait aucune chance. Il en est pourtant sorti vivant. Je tire de son récit, une nouvelle noire en 21 jours pour le concours « Quais du Polar » 2021.

À la lecture de « L’Affaire Roundup à la lumière des monsanto papers », j’étais effondrée. Ce témoignage fourni, écrit par Gilles-Éric Séralini, vient d’être publié. Il offre le récit d’un parcours d’épreuves que nombre de chercheurs ne parviennent pas à supporter. Face aux lobbys de l’industrie chimique, Séralini n’avait en effet aucune chance. Il en est sorti vivant. Vainqueur aussi, mais pas conquérant. J’en tire une nouvelle noire en 21 jours pour le concours « Quais du Polar » 2021.

Je m’arrête sur la scène la plus intime du récit de Séralini pour habiter la vision

La mine grave, ils lui annoncent que la mort le guette au bout du couloir. Photo de Mia Powter

Le professeur Séralini est accueilli à son arrivée à Londres. À quelques heures  de sa conférence, on insiste pour qu’il prenne le métro. Le professeur réclame pourtant un taxi, mais il finit par fléchir. Une fois dans les souterrains de la capitale anglaise, un homme avec une valise heurte Séralini. Son bagage touche notre héros. Rien de mal. Juste la sensation d’avoir été piqué au mollet. Le soir venu, alors que la conférence allait démarrer, Séralini se retrouve aux urgences. Il a une fièvre carabinée.  On lui annonce qu’un staphylocoque dévastateur lui gangrène la jambe à une vitesse incontrôlable. Séralini sera sauvé in-extremis, mais des mois de convalescence l’attendent. Il y a beaucoup d’émotion dans l’histoire vécue et relatée par Séralini lui-même. Son récit part dans les détails du roman noir, jusqu’au couple de chirurgiens en tenue de soirée, qui se tenaient à son chevet après avoir été appelé en plein spectacle. La mine grave, ils lui annoncent que la mort le guette au bout du couloir.

J’extirpe du récit de Séralini, la scène la plus chargée en émotion pour interroger mes personnages

À la lecture de cette scène, le poids de la diplomatie pèse aussi lourd que l’urgence médicale. Cette tension-là doit se retrouver au cœur de la nouvelle noire que je tirerai de son livre « L’Affaire Roundup […] ». Reste 12 jours pour l’écrire.  La tension, c’est de l’émotion. Il y a de l’émotion entre le narrateur-personnage cloué au lit, fiévreux, dans un état très critique, et les chirurgiens en tenue de soirée qui viennent le sauver, si possible. Séralini a la chance d’avoir échappé à la mort. Nous aussi, pour lire ce qu’il a à raconter de son parcours. Ça donne tellement de valeur au récit lui-même, à la pure narration, que le lecteur entre instantanément dans le triangle d’émotion ainsi formé. Logiquement, les mêmes ingrédients sont réunis pour former le même triangle émotionnel entre le narrateur, les personnages et le lecteur. Logiquement, mon couple de héros est soudé. Soledad et Rinaldo Sirrar sont devenus proches au cœur de la tourmente.

Les scènes tournoient dans un vent d’émotions qui guide la mécanique narrative

"Elle a participé aux années de recherches qui les ont amenés à la vérité". Photo de Fernando Zhiminaicela

L’équipe de Sirrar essuie des tirs de partout. Tout le monde explose au contact de ses membres. Sous la panique et les pressions constantes, des collègues, des élus, des responsables publics et privés se révèlent. L’héroïsme (ou l’inconscience) de Sirrar et de son équipe éclabousse le confort de chacun. Et, ce serait gérable si l’équilibre familial de ces têtes brûlées n’était pas lui aussi en péril. Dans ce contexte, on comprend aisément qu’être membre de l’équipe veut dire quelque chose. Alors, Soledad peut bien attirer le scandale le plus destructeur, menaçant la crédibilité de l’étude même, elle a participé aux années de recherches qui les ont amenés à la vérité. Ça ne s’oublie pas, assurément. Tensions et émotions sont donc au rendez-vous. Par quoi vais-je donc démarrer l’histoire de cette nouvelle noire, tirée de « L’Affaire Roundup […] » de Gilles-Éric Séralini ? Après sa convalescence ou au moment où la valise le pique ? Quand commence l’histoire ? À SUIVRE

Découvrez les mécanismes d’écriture d’une nouvelle noire en 21 jours

Une nouvelle policière se déclenche comme un récit craché dans la panique. Elle se découpe en séquences rapides. C’est intense, soudain. Séquençage de 21 jours à suivre ici

Au sortir d’un hiver épuisant, j’accueille la lutte du printemps avec enthousiasme. Je réponds au concours de nouvelles « Quais du Polar » 2021. 21 jours pour écrire une nouvelle noire à vos côtés, et pour en découvrir les mécanismes de narration. Je sors à peine de « L’Affaire Roundup », étrangement similaire à l’affaire du virus actuelle. Alors, un concours de nouvelle noire sur le thème « nature et environnement, terrain de jeu du crime ? » Ça ne se refuse pas. Suivez le guide !

D’abord, nous savons tous raconter des histoires sous forme de scénarios

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Fiction et Réalité sont les deux faces d’une même pièce - Photo de Tumisu

D’abord, j’ai l’impression d’extirper une scène d’un scénario. J’en crée un nouveau. Oui, j’écris à partir d’un scénario déjà vécu. Vous comprenez ? Raconter et inventer sont deux processus qui se confondent. On raconte ce qu’on invente. Et, même quand on n’invente pas ce qu’on raconte, on invente ce qu’on raconte. Ce que je veux dire, c’est que l’imagination ne fonctionne qu’en étroite relation avec la réalité. Donc, fiction et réalité ne sont que les deux faces d’une même pièce. Ok, dit comme ça… je veux dire que, pour raconter une histoire du style « tu ne croiras jamais ce qui m’est arrivé », l’invention de « l’histoire vraie » commence.

Ensuite, nous savons qu’il faut rythmer son récit pour capter l’auditoire

fenêtre sur l'horreur
Je dessine des fenêtres pour voir à travers - Syaibatul Hamdi

Pour moi,  une nouvelle noire est un monde de suspense tiré d’un monde plus complexe. Cette nouvelle policière de 6 pages se déclenche comme un récit craché dans la panique, une histoire dans l’histoire. C’est intense, soudain. Elle se découpe en séquences rapides. Ces séquences s’imbriquent les unes aux autres pour en restituer toute l’horreur, toute l’absurdité, et tout l’espoir d’avoir survécu au récit. Concrètement, comment j’écris cette nouvelle en 21 jours pour le concours « Quais du Polar » ? J’écris des scènes qui n’ont ni queue, ni tête, je les griffonne aussi sûrement que je dessinerais des fenêtres pour voir à travers, et pour découvrir l’intimité du monde que j’invente.

En amont, nous témoignons des mécanismes de notre propre monde

famille masquée
« Nature et environnement : nouveaux terrains de jeux du crime ? » Photo de Mohamed Hassan

Après « L’affaire Roundup à la lumière des monsanto paper’s », je continue la lecture de « Un empoisonnement universel » de Fabrice Nicolino, que j’alterne avec « La biologie des croyances » de Bruce Lipton — une « histoire » plus joyeuse. Bon an, mal an, je plonge comme je peux dans l’univers des scientifiques, lorsque je tombe sur le thème du concours  « Quais du Polar » 2021. Comme je suis en plein dedans, me dis-je, autant me lancer ! Lectures de circonstance. C’est l’occasion de faire une reconstitution fictionnelle de notre réalité terre à terre qu’on prend en pleine face depuis le confinement du printemps dernier, en mars 2020.

Enfin, nous choisissons de reconstituer la scène dans toute sa vérité

poison chimique
"Histoire vraie" d'un emprisonnement universel - Photo d'Adrian Malec

« Nature et environnement : nouveaux terrains de jeux du crime ? » Mes lectures du moment (qui ont eu raison de mon moral au sortir de l’hiver) me conduisent naturellement à répondre au thème avec enthousiasme. Car, la fiction a pour moi le pouvoir de me rééquilibrer les chakras. Je vous entraîne donc dans l’invention d’une histoire  tirée de mes lectures. Et, celles-ci n’ont rien d’une fiction. Ce sont des contes estampillés « histoires vraies » ou (attention ça devient subversif) « enquêtes journalistiques ». Il est vrai que j’aime autant écrire des fictions que décortiquer la manière dont les idées me viennent pour nourrir l’écriture en cours. À SUIVRE