Comment l’artiste copie et pourquoi ?

light-bulb-Colin Behrens
Ces imitateurs n’ont peut-être pas trouvé leur place dans l’univers artistique – Photo de Colin Behrens

L’humour noir du profit

Salut tout le monde ! Je vais aborder ici la question de l’artiste copieur, l’artiste voleur. Pourquoi ? Pour alimenter notre réflexion sur la création, en écho aux polémiques sur les humoristes français qui volent les sketchs des autres. Que peut-il se passer dans leur tête ? Prisonniers d’un système où je refuse de les enfoncer plus encore, je dirais plutôt qu’ils sont pris dans les filets de ceux qui se servent d’eux pour asseoir leurs profits (on en est tous plus ou moins là).

Tout artiste copie. Alors pourquoi ces imitateurs, ces voleurs de sketchs, mériteraient-ils tant de mépris ? Sont-ils des artistes ? Peut-être ne le sauront-ils jamais eux-mêmes. Le milieu socio-économique où ils développent leur « art » ne nourrit peut-être pas leur passion.

CopyComic, le vengeur masqué

Dans le milieu du show business, l’artiste est enrôlé dans la machine. Peut-être qu’il est humainement impossible de produire à tout va, d’être drôle à toute heure et de supporter les impératifs de rendement. Malheureusement, et de tous temps, plus le public se complait dans l’ignorance, plus il est pris pour un boeuf. La création ne se base pas sur une source d’inspiration infinie. Même pour les génies, le labeur est de rigueur.

La passion de l’imitateur

Ah, la passion ! Celle qu’a l’artiste de s’inspirer de tout et de tous, du moindre détail rencontré au détour d’un rayon de soleil qui éclaire une scène ; d’une parole étonnante qui devient fantastique ! Il n’est jamais très facile d’installer dans nos vies cette recherche profonde que la magie dirige vers les rencontres les plus essentielles.

Alors, ces imitateurs ont-ils trouvé leur place dans l’univers artistique ? Qui sait, l’idée de « prendre » les séduit peut-être sous la pression du rendement ? Et il y a ceux qui brandissent leur carte d’interprète ! Ignorer ce qu’il y a dans la soupe permet de la servir avec le sourire. Tout le monde sait ça, non ?

Je défends ici la réalité sociale de l’artiste. Quelle qu’elle soit, sachez que la frénésie de sa quête le pousse vite à chasser, bien plus qu’à voler. Car s’il n’arrive à créer, la passion le dévore. Il en va donc de sa survie de se nourrir de lui-même et bien souvent des autres. Les plus grands artistes, Picasso, Shakespeare, n’ont pas lésiné !

L’artiste est un cannibale qui vous invite à table !

Peut-être que nos humoristes perdus n’ont pas été initiés à ce secret honteux. Oui, l’artiste est un cannibale qui vous invite à table ! Des mets bien choisis, cuisinés d’intentions, pour être enfin servis. 

L’exercice a pour sens de se trouver, de se goûter, et de transférer la saveur humaine au centre de nous-mêmes. L’imitateur imité perd le goût authentique et ne peut s’y retrouver. Puisque tout artiste, au final, puise au centre de son être le goût de son humanité.

J’ai vraiment à cœur de vous faire découvrir comment la lecture et la vie me permettent d’écrire. Vous révéler ainsi mes pratiques cannibales. Et c’est pourquoi je vous dis tout ça. J’ai publié un premier texte qui ouvre l’écriture en ligne de « La Main Invisible », mon roman d’aventure, et futur best-seller (j’y crois plus que tout). Et mon intention est de vous en livrer les secrets !

Grand mangeur, l'artiste se nourrit d'humain - Photo de Shane Foren

Comment je copie et vous le sers en dessert

Ce n’est pas un travail linéaire, l’écriture d’un roman. Je sais, vous vous dites, un écrivain est absorbé par le déchaînement frénétique des chapitres qui se déversent sur la feuille à une allure démente. Absolument, les séances d’écriture dont je parle dans mon bonus présentent de tels ressorts. Certes, un écrivain qui baigne dans l’antre de l’inspiration est une image réelle (bien qu’éphémère). Tout autant que celle où il fume du bulbe.

Car le roman se construit tout de même comme un puzzle. C’est, le plus souvent, un assemblage, une fabrication qui nécessite des matériaux, des matières premières et de l’ingéniosité. Eh oui ! Faut juste bosser proprement et avec force conviction, c’est tout. C’est long, passionnant, et aussi difficile que devenir le meilleur maçon de France. Parce que moi, mon best-seller, je le veux !

Dans mon prochain article, je dévoilerai donc comment je copie. Bien sûr que je copie ! Et je veux vous expliquer comment. Comment je me sers de la lecture d’un livre pour identifier mon propre personnage. Il s’agit du livre d’Anne Sibran, « Enfance d’un chaman ».

L’artiste cherche au-delà des convenances

Mon héroïne s’appelle Mia, et Anne m’offre l’occasion de connaître le grand-père de Mia.

Bah oui, je trouve que le chaman d’Anne est parfait pour ce rôle. Mais, je dois vous dire qu’en réalité je ne me l’approprie absolument pas, je l’intègre par contre entièrement à mon imaginaire.

Il existe bel et bien désormais dans la réalité de Mia. Je dirais que c’est plutôt comme ça qu’un artiste opère, la quête est réelle, la restitution est imaginaire. Mais, sans remord, on en goûte la chair. L’éthique du cannibalisme artistique est ancienne et codifiée. Elle se transmet en silence.

Le lecteur s’y perd avec délectation. Mais, si l’artiste s’y perd, c’est qu’il n’a pas été jusqu’au bout — il n’a pas su trouver qui il était, ni comprendre d’où lui venait son intention.

Et pour ces pauvres humoristes pris la main dans le sac, je dirais qu’ils ont été pressés par la bienséance. Et puis, c’est un peu dégueu de se trouver soi-même. Vous ne pensez pas ?

La poésie se nourrit de tout, rien ne lui est interdit. Voici le livre que j'ai volé

La mise à nu d’une copieuse

Maintenant que j’ai mis tout cela au clair, je vous embarque dans la phase de création. J’ai concocté pour vous un article qui dévoile comment je m’inspire, comment je m’imprègne, comment j’imite et je vole l’écriture d’Anne Sibran — qu’elle a volé elle-même à un chaman, en pleine jungle équatorienne. Alors, vous pourrez ainsi juger si ces termes ont le même sens au cours d’un travail d’inspiration créatrice.

En effet, à la lecture de ce livre, j’ai découvert un matériau d’imprégnation formidable pour intégrer mon personnage, Mia. Enfant, elle vivait elle-même en pleine forêt, hors du monde civilisé. Anne Sibran a rencontré son grand-père. Un truc de dingue ! Jugez de la peine encourue pour avoir volé un grand-père ! Cliquez ici pour recevoir en prime time cette indiscrète confidence* : la pure et dure réalité de l’artiste en émoi. C’est l’âme d’une copieuse mise à nu.

Vous avez un avis sur le sujet ? Exprimez-le