Mon atelier d’écriture avec Bernard Werber

Je suis allée à Paris pour rencontrer Bernard Werber à l’occasion de son atelier d’écriture. Autant dire que l’après-midi d’hier était magique

L'écrivaine solitaire à l'assaut de Paris
"Comment rester focus sur l'écriture de son roman sans se sentir trop seul(e) ?" Question posée à Bernard Werber Interview vidéo en bas de cet article Photo PitCrewProd

Salut tout le monde ! Je suis allée à Paris pour rencontrer Bernard Werber à l’occasion de son atelier d’écriture, un évènement gratuit organisé par Amazon Academy. Autant dire que l’après-midi d’hier était magique, sans pour autant revêtir la densité d’une master class telle qu’il le propose régulièrement sur son site rien que pour nous. Qu’importe ! Le jeu était délectable et Bernard Werber a encore fait la démonstration de son talent de meneur d’intrigues. Au fond, il rappelle astucieusement qu’entre l’écriture d’un roman et l’écriture d’une histoire, nous avons tout un monde à découvrir en nous, et dans notre rapport au monde. C’était l’enjeu de cet atelier d’écriture auquel j’assistais, émerveillée de tant de candeur et de simplicité. Et, pendant la pause, j’en profitais pour demander à Bernard ce qu’il conseillait pour rester focus sur l’écriture sans se sentir seul, isolé et lâcher la pression. Voir ma vidéo en bas de l’article.

Dans l’atelier d’écriture de Bernard Werber souffle le vent d’une liberté retrouvée

Bernard Werber Paris
"Un atelier avec Bernard Werber, ça vaut le détour. J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer un homme aussi libre !"

Un atelier avec Bernard Werber, ça vaut le détour. Vous bénéficiez alors d’une vraie récré, une récréation pour les grands enfants que nous sommes. On ne voit pas le temps passer, on oublie le monde extérieur, et on se laisse complètement happer par l’espace-temps des gens heureux. Bernard Werber est passé maître dans l’art de transformer la réalité en pur délice créatif. J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer un homme aussi libre !

Bernard Werber insuffle un vrai sentiment de légitimité

Dès les premières minutes, Bernard Werber nous transporte dans la beauté d’un jeu qui nous appartient tous, au-delà de nos convictions de n’être qu’une identité figée dans les différents rôles que nous nous attribuons. Il nous révèle à nous-mêmes, il fait émerger cette certitude enfouie que notre écriture est éloquente et légitime. Quelques images se succèdent à l’écran pour que nous en révélions l’histoire — une simple phrase à faire sonner, une histoire à elle seule, une image qui raconte un avant et un devenir. En quelques mots, ces illustrations nous interpellent, nous font rire, projettent une possible narration. C’est enfantin et efficace.

Premier commandement de cet atelier d’écriture : « arrêtez de vous juger ! »

Cette mise en bouche fonctionne à merveille et, tout du long, on se rassemble, on interagit, on crée et on s’exprime avec un naturel déconcertant. Le secret de cette liberté de parole écrite, clamée, partagée, tient aussi de sa mise en garde. Le mot « SPOKE » s’affiche à l’écran. « Ce que vous allez apprendre, vous servira tout le reste de votre vie. SPOKE est un mot grec qui signifie : travailler sans se juger. Voilà ce que nous allons faire aujourd’hui. Arrêter de se juger ! Nous sommes des machines à juger et, au final, nous nous jugeons nous-mêmes. C’est ce processus-là qui nous empêche d’écrire. Pour écrire, vous allez éteindre votre mental et découvrir la joie d’être créatif. On est là pour s’amuser, soyez réactifs ! »

Deuxième commandement de cet atelier d’écriture : « écrivez sans réfléchir ! »

Comme tout homo-écriturus qui se respecte, nous connaissons forcément le premier secret de l’écriture : « se laisser aller à écrire sans réfléchir comme un cheval qui galope ». Cette liberté, nous l’avons découverte, un jour, puis oubliée ou enfouies dans l’inacceptable. Car, malheureusement, la notion de risque et d’erreur nous est devenue insupportable, au point de brimer notre audace. « Surtout, ne vous arrêtez pas pour vous dire : merde j’écris des conneries ! Écrivez librement, n’importe quoi, sans réfléchir et sans vous arrêter. Soyez libre ! » Acceptons donc de tout réapprendre pour recouvrer notre liberté. Et le plus drôle dans tout ça, c’est que ça ne demande pas tant d’effort.

Dans  l’atelier d’écriture de Bernard Werber l’eau qui dort se réveille limpide

la parole se déroule
"Vous connaissez quelqu’un qui prend plaisir à faire chier les autres ? Qui aime vraiment ça ? Quelqu’un a-t-il rencontré une personne comme ça ? "

Des petites annonces loufoques sont prises en exemple, des faits divers, des plaques professionnelles photographiées sur un mur d’immeubles… nous confirment que « le réel dépasse l’imaginaire ! » On y puise un nombre fabuleux d’histoires complètes. Mais ce n’est pas tout ! Les heures s’enchaînent sans qu’on y prenne garde et Bernard amène les sujets du vécu, ces drames qui dépassent la fiction. Et voilà comment l’auteur de « Les Fourmis » et aujourd’hui « Sa Majesté des chats » nous entraîne sur son sillage.

Dans l’atelier d’écriture de Bernard Werber les résistances se délitent

« Écrire est plus facile que vous ne l’imaginez » claironnait-il en préambule. Rien ne vous oblige à pondre un manuscrit, écrire peut être un hobby. Sous-entendu : ne vous en privez pas ! Je me demande alors combien de fois nous aurons besoin d’entendre qu’on est tous capables d’inventer des histoires ? Nous avons ça dans la peau ! Et, sous prétexte que l’écriture proprement dite exige une certaine rigueur, nous ne serions pas capables d’en approcher la beauté ? Au fond, c’est peut-être ça qui nous dissuade d’écrire en toute liberté. Bernard Werber a vraiment le chic pour nous ôter toute résistance. Il semble que nous ayons intégré les deux préalables. À savoir : apprécier le processus d’écriture sans se juger et, en conséquence, apprécier ce qu’on écrit.

 L’écriture est un jeu d’idées choc d’où jaillit la clarté

À chaque exercice d’écriture, une consigne nous est donnée, un temps nous est imparti et une musique nous accompagne. Le truc qui nous rassemble c’est le thème de départ : « Trouvez un mauvais sujet de roman ». Les idées les plus inappropriées fusent. Les cornichons sont adoptés à la grande majorité, reléguant les hémorroïdes et les pieds qui puent au domaine des sujets par trop ragoûtants. Une fois la « promotion cornichon » auto-proclamée, les réjouissances se poursuivirent autour du cornichon : histoires d’amour courtes, histoire qui fait peur,… Nous avons joué le rôle de l’écrivain sans peur et sans reproche auquel je crois plus que tout. Le pied total !

Bernard Werber nous enseigne la beauté simple de notre incongruité

Bernard Werber ne fera pas l’impasse sur les règles essentielles qui mènent une histoire à son terme. Ce qui fait un héros ou une héroïne, explique-t-il, c’est qu’il cherche à savoir qui il est vraiment. Parce que les autres ne savent pas mieux que vous qui vous êtes. Alors, pour rendre son personnage vivant, il doit relever un challenge. Et, plus le challenge est difficile, plus le héros sera méritant. Ensuite, vous devez trouver une stratégie originale. Le héros est face à un dilemme et ne fait pas vraiment ce qui est logique. C’est pour ça qu’il est intéressant. Pour illustrer son propos, s’affiche à l’écran une liste de choses à faire pour perdre 5 kilos suivie avec une recette de fondant au chocolat. On rit, c’est en effet simple à comprendre.

L’atelier d’écriture de Bernard Werber est un ballet de personnages masqués

atelier d'écriture bernard Werber
"Le méchant dynamise le récit. Il introduit le mystère et révèle le héros"

« Faites un pas de côté pour éviter le crachat »

Comme cet atelier d’écriture ne durait que quatre heures, il fallait un sacré talent pour le rendre à la fois productif, créatif, interactif et instructif.  « Les gens racontent des conneries, vous les portez, les accouchez et pouf ! Ça fait un livre. Vous connaissez quelqu’un qui prend plaisir à faire chier les autres ? Qui aime vraiment ça ? » Quelqu’un a-t-il rencontré une personne comme ça ? La plupart du temps c’est notre cerveau limbique qui réagit et on se demande « pourquoi moi ? ». Mais si vous faites un pas de côté pour ne pas recevoir le crachat et que vous observez cette personne, ses mécanismes de pensée, vous disposez d’un personnage à exploiter. Vous procédez à une métabolisation par l’écriture. Allez ! Racontez-moi une histoire avec quelqu’un de très méchant.

« Regardez votre voisin dans les yeux pendant 20 secondes »

Le méchant dynamise le récit. Il introduit le mystère et révèle le héros, il le met face à lui-même. Nous disposons de trois mécanismes principaux : la recherche de sécurité, les automatismes émotionnels et la logique. Le héros subit une injustice de la part du méchant et finit par comprendre et par se venger. Ce principe marche à tous les coups. Après ces explications, retour aux exercices avec la création d’une fiche personnage, mais pas n’importe laquelle. L’exercice consiste à regarder son voisin dans les yeux, puis à bien l’observer avant d’en faire une fiche personnage : qualité principale, défaut majeur, relation avec son père, sa mère, plat préféré. A-t-il déjà volé, s’est-il battu, saoulé au point de rouler sous la table ? « Vous ne devez pas vous connaître. Est-ce que vous vous êtes parlé avant ? Non ? Parfait, alors c’est parti ! »

Sentez la puissance subtile de cet exercice !

Mon voisin est un concepteur de jeux de société qui s’est lancé dans l’entrepreneuriat. Qualité : entrepreneur. Ça, j’avais bon car j’avais triché, l’ayant vu faire ses comptes avant le démarrage de l’atelier. Ensuite, j’ai eu à peu  près tout faux. Lui s’est nettement mieux débrouillé mais, je suis assez transparente dans mon attitude, ça a dû l’aider. Bref, c’est un exercice d’une grande puissance pour approcher la création d’un personnage et comprendre que l’observation est une technique subtile de questions/déductions. Bernard Werber avouait qu’au début de sa carrière il associait systématiquement la photo d’un acteur ou d’une personne réelle à sa fiche personnage.

Cet atelier d’écriture résonnera encore longtemps en moi

le ballet masqué atelier d'écriture Paris
"le « manuscrit », un organisme vivant dont le squelette est essentiel, dont les organes représentent les plus belles scènes."

Comment nourrir son inspiration sans être hanté par l’irrationnel ?

Ainsi se termine pour moi cette bulle d’inspiration temporelle car je devais retrouver le tic tac de l’horloge qui annonçait le départ de mon train à destination du Havre. J’ai juste le temps de l’entendre personnifier le « manuscrit », un organisme vivant dont le squelette est essentiel, dont les organes représentent les plus belles scènes. Sans plan, prévient-il, on aura tendance à tricher, à s’empêtrer dans la surenchère, voire à basculer dans l’irrationnel pour parvenir à trouver une fin à la mesure de son début prometteur. Ça, ce n’est pas faux, c’est même intelligemment décrit : la hantise d’une fin qui nous échappe ! Bref, Un roman, c’est : « un début, un milieu, une fin, trois parties de même puissance, toutes d’égale importance ». Voilà qui clôture bien ma séance et résonne avec le coup de sifflet qui annonce mon départ.

Ma question à Bernard Werber : comment écrire un roman sans se sentir trop seul ?

Tout écrivain qui souhaiterait organiser un atelier d’écriture devrait participer à une master class de Bernard Werber ! Il rappelait que plus de la moitié d’entre nous, français, avons déjà songé à écrire un livre. N’est-ce pas ? Pourtant, nous ne serions que 3 % à posséder un manuscrit achevé et prêt à être offert à la lecture. C’est inadmissible ! Je pense que l’homme généreux et enthousiaste qui se tenait devant moi est bien résolu à faire bouger les choses et je suis bien décidée à le suivre sur ce terrain. J’ai emporté avec moi un petit souvenir. Pendant la pause, je lui ai proposé de répondre à une question qui vous intéressera, un petit souvenir vidéo de ma rencontre avec Bernard Werber juste en-dessous.

Comment faire de l’écriture un vecteur d’expression de la vie ?

Mais, attention les amis ! L’écriture n’est peut-être pas le seul vecteur d’expression qui vous correspond. Ce besoin viscéral que nous avons d’exprimer ce que nous sommes, et ce qui, sans le moindre doute,  nous donne le sentiment de répondre à la vie, se trouve quelque part entre la parole et l’écoute, entre le silence et le souffle, entre le mouvement et l’émotion. Nous recherchons parfois toute notre vie cette légitimité d’être en vie, qui ressurgit quand on écrit, et sème le doute. Expérimentez dans l’écriture, la danse, le sport, l’art ou les voyages ce quelque chose qui est en vous, qui cherche à savoir qui vous êtes et ce qui est vraiment important pour vous. Pourquoi ? Mais parce que vous êtes le héros de votre vie et que vous êtes le seul à pouvoir découvrir. Comme le rappelle Bernard, « les autres ne savent pas mieux que vous qui vous êtes ».

Souvenir vidéo : question à Bernard Werber

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Théâtralisons notre récit : secrets et accessoires

Pour ce troisième épisode de notre défi « J’écris un roman en 3 mois avec mon fils », j’ai passé deux heures à la recherche de menus détails. Pour théâtraliser notre récit, il faut que nos acteurs trouvent leurs accessoires.

Bonjour tout le monde ! Pour ce troisième épisode de notre défi « J’écris un roman en 3 mois avec mon fils », j’ai passé deux heures à la recherche de menus détails.  Pour théâtraliser notre récit, il faut que nos acteurs trouvent leurs accessoires. D’abord, Sarah devient Cécile. Prénom aristocratique latin, il sera plus approprié que Sarah, prénom d’origine hébraïque. Ensuite, la maison ! Je me suis amusée à la chercher. Et vous savez quoi ? Je l’ai trouvée ! Bon, ce n’est pas une villa à 10 millions de dollars, mais une ancienne demeure familiale typiquement basque où Cécile préférait se retirer pour se remettre de l’accouchement. Très vite, d’ailleurs, elle décide d’y séjourner de façon permanente, le temps de voir venir, que Line grandisse un peu. Antoine se plie de mauvaise grâce à cette lubie, mais y trouve rapidement un intérêt lorsque son usine chimique de Mont — à une heure en voiture — est secouée par de violents mouvements sociaux.

La théâtralisation du lieu permet d’habiter notre récit au-delà du simple décor

Maison StJean La Rêka

Le théâtre de notre histoire est donc cette demeure familiale d’Antoine d’Haranguier, située à l’entrée de Saint Jean de Luz et qu’on appelle familièrement « La Rêka » (ruisseau en basque). C’est une maison à colombage typique du coin et de dimension modeste. Elle compte quand même une superficie de 650 m2, deux étages et quatorze pièces. Datant du tout début 18ème, elle comprend une écurie, une piscine et 2 hectares de forêt que traverse un ruisseau. Le coin idéal pour élever une super-héroïne !

Dans ce décor, les secrets de famille se dessinent

Line était réveillée tous les jours à 7 heures par Winston. Ça évitait à la nourrice d’essuyer les plâtres, et à Line de démarrer sa journée par un drame. Mais, ce qui était sûr, c’est qu’Antoine trouvait ça déplacé. Certes, il avait bénéficié de l’attention de Winston étant enfant, mais pas de cette manière, son père ne l’aurait jamais permis. Et, ce jour-là, il avait bien l’intention de bousculer les habitudes matinales de son majordome. Antoine était arrivé la veille, prétextant des affaires pressantes à LACQEM, son usine de chimie à Mont. Levé à 6 h00, il alla prendre le café dans les quartiers de Winston. La maison n’était pas à son goût. Elle manquait d’intimité. Exigüe, mal éclairée et surchargée de bricoles inutiles, il aimait pourtant parcourir ses espaces confinés imprégnés de souvenirs.

— Puisque vous semblez prendre racine à Saint Jean, j’aimerais que vous m’accompagniez à l’usine, lança-t-il sans s’annoncer. Bertrand Darche a des difficultés avec le maire. La population fait pression sur les autorités pour des raisons environnementales. Jusque-là, le préfet était conciliant, mais il a été récemment remplacé. Et nous n’avons plus de soutien de ce côté-là. J’ai besoin de vous sur place, pour comprendre la situation et entrer en contact avec les nouveaux acteurs locaux.

— L’annonce de Darche de supprimer les postes de nuit des mécaniciens-pompiers a mis le feu au poudre, répondit Winston qui s’était préparé à cette entrevue et servait déjà un café fumant sur le comptoir de sa cuisine.

— Oui, j’ai donné mon accord de principe pour une réorganisation progressive, mais il n’en a fait qu’à sa tête ! Ce Darche manque décidément d’esprit tactique dès qu’il s’agit de politique. Si la famille est ici, je n’aimerais pas que les choses dégénèrent au point que Cécile soit inquiétée, vous comprenez ?

— Fort bien, j’ai entendu des rumeurs… les salariés se sont réunis la semaine dernière avec un groupe d’activistes de Pau pour organiser des actions choc. Ils préparent un coup en marge de la manifestation du 10 novembre à Mourenx.

— Bien, je vois que vous restez vigilant.

— C’est mon rôle, Monsieur. J’ai envoyé quelqu’un à cette réunion. Ils ont parlé de « La Rêka ». Pour l’instant, personne n’a suggéré de s’y rendre, mais il ne faut pas exclure une opération de sabotage sur le site.

— Qui sont-ils ?

— Des anciens de LACQEM, pour la plupart, qui enrôlent les employés les plus jeunes. Il y a aussi des salariés de LUBRIZOL de Mourenx, et pas mal d’habitants de la région : Mont, Orthez, Pau essentiellement. Ils craignent un accident de grande ampleur. Les élus sont sur la brèche, ils seront présents cette fois.

— Oui, depuis l’incendie de Rouen, le monde s’agite dans tous les sens, c’est la débandade ! Qui est votre informateur ?

— Un salarié de LACQEM qui part en pré-retraite. Il est avec nous. Je l’ai convaincu de s’allier à notre cause. Il n’apprécie pas le PDG, personne ne l’apprécie d’ailleurs, mais il restera fidèle à la famille.

— Il peut s’infiltrer parmi les activistes ?

— C’est déjà fait. Il est très estimé. Le noyau dur lui fait confiance.

— Parfait, augmentez ses gages.

— C’est prévu.

Antoine s’attarda sur le visage de Winston. Son expression n’avait pas changé, malgré les rides discrètes au coin de ses yeux, Antoine retrouvait ce regard doux et pénétrant qui avait tant de fois su apaiser ses colères.

— Je suis désolé d’avoir douté de votre jugement, Winston.

— Plaît-il ?

— Je veux dire, à propos de Line. J’ai pensé que vous lâchiez un peu du lest dans nos affaires.

— Vous devriez savoir que la sécurité de la famille d’Haranguier est et restera ma priorité, Monsieur.

— Oui, je devrais pourtant le savoir…

Des cris leurs parvinrent provenant du rez-de-chaussée. On entendait Élise s’exclamer haut et fort, et Line pleurer toutes les larmes de son corps. Winston et Antoine se levèrent dans un même élan et se dirigèrent ensemble vers la cuisine. Élise levait un gros livre relié au-dessus de sa tête tandis que Line trépignait de rage, les bras tendus vers sa nourrice qui, à l’évidence, refusait de lui donner l’objet de sa convoitise. Le plus drôle c’est que ce livres faisait presque la taille de l’enfant.

un grand livre relié
"Le plus drôle c’est que ce livre faisait presque la taille de l’enfant." photo DarkWorkX

— Que se passe-t-il ici, s’écria Antoine. Qu’est-ce que c’est que ces simagrées ?

Elise se retourna le regard furibond.

— Line s’est introduite dans la bibliothèque et avait attrapé ce livre ÉNORME !

— Et, c’est tout ?

— Non, elle était juchée sur une échelle et le poids du livre l’aurait assurément renversée si je n’étais pas intervenue à temps. Et maintenant cette demoiselle ne veut rien savoir. Elle doit pourtant apprendre à obéir.

Winston s’était approché d’Élise et lui pris doucement l’ouvrage des mains.

— Une édition originale de « Alice au pays des merveilles ». C’est un livre que je lui lisais souvent étant bébé.

— Madame d’Haranguier m’a bien spécifié que la bibliothèque était interdite à Line, qu’elle regorgeait de livres précieux.

—C’est vrai, intervint Antoine. Le plus surprenant c’est qu’elle ait pu attraper celui qu’elle voulait. Je crois en effet qu’il se trouve dans les étagères supérieures, non ? Une sacrée montée pour un si petit de chou.

— Absolument, elle aurait pu se rompre le cou. Et, il est important qu’elle comprenne qu’à son âge la bibliothèque lui est interdite.

— Bon, écoutez Élise, le plus simple est de laisser la bibliothèque fermée à clé et…

— Justement, Monsieur ! La pièce est toujours soigneusement fermée et la clé accrochée sur le tableau du vestibule, à une hauteur qui ne lui est pas accessible, Dieu merci !

— Mais alors, comment ?

— C’est un mystère ! Je demanderai qui a pu laisser la clé sur la porte et prierai Madame d’Haranguier de la mettre hors de portée de tous, quitte à y faire moi-même le ménage. Line est obsédée par cette bibliothèque !

Winston sourit. Il avait déjà surpris Line en train d’escalader le guéridon de l’entrée après avoir pris soin de rapprocher l’un des fauteuils placés plus loin dans les niches des fenêtres. Il avait suspecté son intention d’attraper les clés sans se douter qu’elle en cherchait une en particulier. Il se dit qu’il devrait prendre le temps de l’observer sans intervenir trop vite. Line passait du temps à lire, c’est vrai. Et c’était plutôt pittoresque à voir. Elle avait à peine 3 ans mais son désir d’apprendre était insatiable et ses questions incessantes. Elle lisait déjà tout ce qui lui passait sous la main mais il avait remarqué que les questions concernant son héroïne préférée ne tarissaient pas. Elle avait à l’évidence décidé d’y répondre par elle-même. Winston savait très bien qu’elle savait déjà lire à son âge, sans pour autant le claironner sur tous les toits. Ça ne se faisait pas, et il pressentait de que ça pouvait bien devenir dangereux. Alors, quand Lise lui montrait un mot qu’elle ne comprenait pas, il lui en expliquait le sens. Depuis peu, il lui avait fait découvrir le dictionnaire. À la grande surprise d’Élise et de Cécile, Line passait désormais beaucoup plus de temps dans les appartements de Winston. Seulement, comme d’un commun accord, Line n’en parlait à personne. Elle avait d’ailleurs bien vite compris que les adultes ne répondaient généralement pas à ses questions, et détournaient les sujets de conversation qui la préoccupaient. Les « pourquoi » de Line n’étaient pas à prendre à la légère. Seul Winston l’avait apparemment compris.

— N’en faisons pas toute une histoire, Élise. Je suis persuadé que Line prendra soin de cet ouvrage.

Théâtre Alice au pays des merveilles
"il avait remarqué que les questions concernant son héroïne préférée ne tarissaient pas" Photo Brunapazini0

Et, joignant le geste à la parole, Winston tendit le livre à Line qui avait cessé de pleurer depuis qu’il s’en était emparé. Le serrant fermement contre sa poitrine, elle regarda Winston avec reconnaissance avant d’aller le poser sur la table. L’effort qu’elle était censée faire pour cela ne parut pas la détourner de son objectif, trop heureuse d’avoir gagné la bataille, et ne se souciant ni d’Élise ni de son père. Elle se jucha ensuite sur la chaise, s’installa en se tortillant légèrement et respira profondément avant d’ouvrir sa merveille. Élise était bouche bée, n’osant protester. Depuis son arrivée, Monsieur d’Haranguier n’était quasiment jamais là et, quand il daignait passer quelques jour à La Rêka, c’était pour fulminer contre tous, particulièrement contre Winston et Madame d’Haranguier. Ça n’empêche, elle restait persuadée que Winston sapait continuellement ses efforts, gâtant cette enfant au point de la rendre capricieuse et indisciplinée au point où ça devenait intenable. Si le père se rangeait du côté de Winston, elle ne donnait pas cher de sa place.

— C’est pas Dieu possible ça ! Vous allez en faire une enfant gâtée et frondeuse. Ce ne sera pas de ma faute si cette petite n’écoute donc personne ! Monsieur d’Haranguier, vous aurez été témoin de mes efforts.

Voilà un épisode qui donne le ton entre les deux hommes de cette maison, une complicité et une confiance qui ne se compte plus en termes d’années mais en termes de souvenirs d’enfance et de secrets de famille, intimement imbriqués dans les secrets d’affaire. N’oublions pas non plus que Winston a élevé sa propre fille, Olivia, aux côtés des deux enfants d’Haranguier : Antoine et Camille. Cette dernière, très indépendante et impulsive, viendra de temps en temps perturber les arrangements familiaux, tel un cyclone qui repart aussi vite qu’il est venu. Mais elle pourrait bien avoir la fonction du messager. Christopher Vogler dit de ce personnage qu’il intervient dans le récit  comme une force soudaine qui empêche le héros de dériver vers le mauvais chemin. Ces figures archétypales servent à jalonner le chemin de l’écriture de point d’ancrages efficaces pour mener à bien son projet. Ici, l’idée d’attribuer un rôle à la tante Camille, me permet d’anticiper la suite, d’imaginer déjà les difficultés que Line va devoir traverser seule, jusqu’à trouver une aide inattendue.

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Composition des personnages

J’écris un roman en 3 mois avec mon fils, épisode 2. La composition des personnages est le terreau de notre roman. S’attacher à eux dès le départ, les relier les uns aux autres et découvrir les rouages relationnels

Salut tout les monde ! Je suis bien contente de vous retrouver pour ce deuxième épisode de notre défi !  La composition des personnages est le terreau de notre roman. S’attacher à eux dès le départ et les relier les uns aux autres est un exercice qui nous fera gagner un temps précieux. Car, découvrir les rouages relationnels qui se mettent en branle autour de notre héroïne éclaire notre chemin. De plus, la composition dramatique nous permet de comprendre les relations qui se trament, et les intentions cachées derrière l’écriture de notre futur récit.

La composition du personnage central

personnage central
"Elle perçoit l’environnement comme un support matériel, comme si elle était reliée à lui", photo de DarkWorkX

Les particularités propres au héros

Line a un besoin vital d’équilibrer son corps dans l’espace qui l’entoure. Durant les premières années de sa vie, l’équilibre est pour elle un enjeu fondamental, comme tous les enfants de son âge. Mais, les humains qui l’entourent détruisent systématiquement ses tentatives. Ça la rend irritable et instable. Comment ça se passe ? Elle perçoit l’environnement comme un support matériel, comme si elle était reliée à lui. Tout objet qui s’y trouve participe à son équilibre corporel, elle calcule son emplacement, son volume et sa masse et positionne son corps en fonction. De sorte que l’espace vide qui la sépare des autres est palpable pour elle.

Elle capte ce qui l’entoure au-delà de ses cinq sens. La protection de notre espace vital, cette zone élastique qui maintient notre sentiment de bien-être, fonctionne bien différemment chez nous, du moins en apparence. Nous sommes conditionnés pour nous appuyer principalement sur la vue, l’ouïe et le toucher. L’odorat et le goût sont minorés et les autres sens que nous possédons sont peu développés consciemment comme l’équilibrioception, ou sens vestibulaire, qui détermine notre sens de l’équilibre. La création de notre super héroïne nous permettra d’explorer ces capacités dont nous percevons inconsciemment le potentiel inexploité. Son comportement n’en est que plus étrange aux yeux des autres. Ça me rappelle « Les enseignements d’un sorcier yaqui », de Carlos Castaneda. L’auteur explique que des fils invisibles relient l’intérieur de notre corps au monde environnant.

Les intentions cachées de l’auteur

intentions cachées de l'auteur
"Pour être libre nous avons besoin d’apprendre à prendre des risques calculés"

Le héros véhicule nos croyances

Line ne supporte pas son lit à barreaux. Elle a le sentiment que son énergie est bloquée. Ça lui donne carrément des convulsions. Elle a peur, ses poumons se compriment, elle a la sensation que tout son corps est entravé. Tiens ! Ça me rappelle la lecture d’un texte que j’avais beaucoup aimé. Celui d’une anthropologue en immersion chez des indiens de la forêt amazonienne. Un père avait construit une sorte de parc pour son bébé avec des branches, mais le bambin avait carrément pété une durite.

Cette chercheuse expliquait que les adultes laissaient les enfants libres de bouger sans surveillance exagérée. Elle avait été témoin d’une scène qui l’avait scotchée : un enfant qui tenait à peine debout jouait près d’un puits qui n’était autre qu’un trou à même le sol. Elle garda son sang froid d’observatrice et nul drame ne se produisit ce jour-là. Ses recherches l’amenèrent à comprendre que laisser l’enfant gérer sa propre sécurité le maintient plus sûrement en vie que s’il est continuellement apostrophé par des « Fait attention ! Tu vas tomber ! ».

Le héros est porteur d’un message

J’avais été marquée par ce texte qui fait écho à ce que je crois profondément. Dans une société où la liberté est une valeur haute, nous nous éduquons à la sécurité avant tout, oubliant que pour être libres nous avons besoin d’apprendre à prendre des risques calculés. Je pense sincèrement que cet apprentissage mérite de commencer aux premiers temps de la vie, accompagné d’une présence affective forte et à d’un maternage poussé.  Mais les exigences de la vie ne nous laissent pas toujours l’occasion d’expérimenter cette approche. Je l’ai pourtant testé au maximum de mes possibilités avec mon fils. D’ailleurs, ça déclenchait des scènes assez drôles dans les aires de jeux où j’entendais les exclamations choquées ou angoissées des parents. J’ai ainsi constaté qu’Anton prenait des risques à la mesure de ses capacités. Mais je m’éloigne de notre sujet.

Le couple central, pilier indispensable de la composition des personnages

le couple central
"Elle ne peut s’endormir si quelqu’un reste à ses côtés, à part Winston, le majordome", photo de Geralt

L’auteur identifie rapidement sur qui le héros va s’appuyer

Line ne supporte donc pas les barreaux de son lit. Elle a la sensation d’être immobilisée, comprimée par un champ magnétique hostile. Elle hurle, étouffe et, rapidement, on installe un matelas à même le sol et on fait disparaître le lit, objet de sa frayeur. Elle ne peut s’endormir si quelqu’un reste à ses côtés, à part Winston, le majordome. Il l’observe à loisir et comprend vite que ce n’est pas un bébé normal. Winston a élevé le père de Line, Antoine.  Il l’a protégé des griffes du grand-père (le père d’Antoine) dont il était l’homme à tout faire. Le job de Winston était principalement de seconder le père d’Antoine dans la gestion des affaires de la famille, il était en charge de ne rien laisser passer qui puisse faire du tord à sa réputation. La mère d’Antoine était une femme absente, organisant des galas et autres soirées mondaines. Si bien que Winston la remplaça dans la gestion familiale. Winston a donc joué un rôle important dans la vie du père de Line. Il a lui-même une fille, aujourd’hui neurologue réputée et chef de clinique. Il y a des chances que Winston puisse discuter du cas de Line avec elle. Ce sera un personnage qui nous donnera des interprétations scientifiques précieuses

 

Le personnage retord qui met l’équilibre en péril

Passons un peu au cas de la nourrice et des autres employés de maison. Winston et la nourrice se répartiront les rôles. Cette dernière s’appelle Élise. Elle est expérimentée et s’aperçoit vite que quelque chose ne va pas, mais elle tiendra le coup pas mal de temps. La famille est influente et Winston fera pression sur Élise pour qu’elle la boucle. Mais Élise a une sainte horreur de la situation, qui va basculer quand le père entrevoit la vérité et que la scène du bac à sable survient (encore que je ne suis pas sûre que les bacs à sable soient un lieu de prédilection pour les enfants de la haute bourgeoisie). J’ai très envie de lire les écrits du couple de sociologues Pinçon-Charlot, qui ont passé leur vie à étudier la haute société française. Ce jour-là, Sarah, la mère de Line, avait choisi d’accompagner la nourrice au parc. L’enfant est encore considérée comme « normale » mais il y a des signes. Sarah écoute les inquiétudes d’Élise, la nourrice, et les prend très au sérieux.

Les personnages de confiance révélateurs de caractères

la famille
"Comment une femme qui se sent prisonnière de son mari ou d’elle-même aurait-elle le courage de tout quitter ? , Travel - Monsterkoi

Un personnage puissant mis en réserve : débriefing avec Anton

On parle de Sarah, la mère de Line. Anton la voit peureuse, introvertie. Moi, j’avais pensé qu’après l’accouchement, le fait d’être une enfant adoptée aux origines inconnues ferait remonter ses angoisses. Certes, Sarah n’est pas sûre d’elle, elle doute de ses capacités en tant que mère, d’autant plus que Line pleure souvent quand elle est dans ses bras. Mais, j’avais imaginé Sarah comme quelqu’un qui lance facilement des pics, des vannes bien senties, qu’elle avait un caractère trempé et que les disputes au sein du couple prendraient des proportions épiques. Anton n’est pas d’accord. Sarah est tout l’opposé de son mari. C’est une femme polie et respectueuse. Il se demande pourtant comment les disputes conjugales se passent si elle est d’accord pour tout. Anton reste néanmoins sur ses positions : Sarah est une femme soumise qui ne fait pas de vagues. Moi, je pense qu’on peut s’arranger avec ça. Lorsqu’on devient mère, on révèle de nouvelles facettes de sa personnalité.

Sarah est peut-être le personnage protéiforme de notre récit

Comment une femme qui se sent prisonnière de son mari ou d’elle-même aurait-elle le courage de tout quitter ? Son foyer, et surtout son enfant ? C’est une question que pourrait se poser le lecteur si Sarah est une personne effacée et angoissée. Bien souvent, une femme qui se sent prise dans la toile d’araignée tissée par son mari et son milieu social rencontre une opportunité, une chance unique qui lui permet de fuir. Pour abandonner son enfant, il lui faut une sacrée bonne raison, même si elle ne se sent pas à la hauteur. Malgré tout, certains troubles ou dispositions psychologiques particulières expliquent une telle décision. Bien sûr, pour Sarah, ce n’est pas le propos. Elle ira trouver ses parents, exigeant qu’ils racontent tous les détails de son adoption. On comprend que Sarah va passer à l’action d’une manière ou d’une autre. Dans le roman, elle disparaît sans que ni le lecteur, ni les protagonistes ne sachent ce qu’elle devient. Quand on retrouvera la trace de Sarah, le mystère s’éclaircira.

Pour comprendre le concept de « personnage protéiforme », écoutez mon podcast « L’archétype du héros » qui se réfère au « Guide du scénariste » de Christopher Vogler.

La composition des personnages ou « composition dramatique »

la biguotte
"On va dire qu’elle est même croyante de fou ! Ça va mettre du peps. Elle croit que Line est possédée", photo de jeffjacobs1990

La composition des personnages a besoin d’un décor et d’une ambiance

Mais revenons à la composition des personnages. Sarah s’est installée dans leur maison de Saint Jean de Luz, avec Winston et Victoire, la cuisinière. Ils embauchent la nourrice et deux employées de maison. L’intérêt c’est que Winston est maître à bord. Il commence à s’occuper de Line la nuit, pour soulager Élise. La nourrice est en effet épuisée. Au début, elle met ses sentiments sur le compte de la fatigue et de l’ambiance tendue entre la femme et le mari. Sarah et son mari Antoine se disputent de plus en plus souvent, même si ce dernier est rarement à la maison. Cependant, Sarah est gentille avec Élise, mais elle est distante avec l’enfant, elle semble même avoir de l’aversion pour sa fille. Je me dis d’ailleurs qu’elle doit forcément retrouver dans le comportement de Line un vécu qu’elle a su maîtriser et enfouir en elle. Il se passe forcément quelque chose dans l’esprit de Sarah, ça carbure la dedans ! Vous sentirez sûrement à ce point de réflexion la nécessité de planter le décor, le plan de la maison, l’atmosphère de la ville et l’entrée de personnages secondaires.

La fonction et le rôle des personnages se précisent

La nourrice est donc affectée dans son travail, elle se sent isolée. La cuisinière n’est pas une copine, et les deux employées de maison sont sympas, mais elles trouvent qu’Élise est trop stricte. Elles sont jeunes et complices, aimant plaisanter entre-elles à son sujet. Victoire, la cuisinière, est au contraire très à l’aise dans cette maison. Elle connaît parfaitement ses patrons, s’entend très bien avec Winston et Sarah lui fait confiance. Victoire emmène Line aux courses et l’installe fréquemment avec elle dans la cuisine. Line est bien avec Victoire qui lui parle beaucoup lorsqu’elle prépare les repas. Victoire est très attentive à l’ordre et à la place des objets. C’est comme une obsession chez elle. Sa dextérité et la fluidité de ses mouvements plaisent beaucoup à l’enfant pour qui la précision des mouvements et l’énergie maîtrisée répondent à ses besoins. Elle est bien dans la cuisine avec Victoire qui constate évidemment qu’il se passe des trucs bizarres. Bref, la nourrice qui suit un protocole stricte se sent mal aimée dans la maison, et a peur de l’enfant.

Notre personnage antagoniste se précise

Line, à l’évidence, n’est pas bien avec Élise, la nourrice, qui s’inquiète d’être renvoyée. Ses références professionnelles pourraient être remises en cause. Avec une famille aussi influente, sa carrière pourrait être foutue. Elle va donc parler à Winston de ses inquiétudes face à Line :

Je n’ai jamais connu une enfant comme ça. On dirait qu’elle veut des choses qu’à son âge on ne peut penser.

— Comme quoi ?

— Quand je lui fais prendre son bain, par exemple, Line pleure si je lui met un jouet qui flotte et, quand je la savonne, je ne peux en aucun cas poser le savon sur le bord de la baignoire. Je dois le poser loin d’elle, par terre où sur la table. Même si je le pose discrètement derrière elle, on dirait qu’elle peut le sentir. J’ai remarqué qu’elle sent des choses sans les voir ou les entendre…

C’est à ce moment-là qu’Anton s’exclame. Ses yeux brillent lorsqu’il me dit : « On va dire qu’elle est même croyante de fou ! Ça va mettre du peps. Elle croit que Line est possédée. C’est cliché mais, c’est trop cool ! » Anton et moi discutons du cas d’Élise. Elle engraine progressivement la mère dans son délire. Non que Sarah croie en une quelconque possession diabolique, mais elle gamberge sur son propre cas de déséquilibre mental lorsqu’elle était enfant. Antoine, le père, doute fortement de leurs allégations, d’autant plus qu’il ne constate rien d’anormal quand il est avec Line.

— C’est logique, intervient Anton, le père est un vrai maniaque !

—Oui, c’est un mec très militaire qui maîtrise tellement ses gestes et son comportement, que Line arrive à supporter sa présence.

Et voilà comment se termine notre épisode 2 ! Le tableau des personnages en présence se dessine de mieux en mieux. Leurs relations, leurs différences et leurs points communs nous permettent de tisser la toile de fond sans toutefois toucher l’objectif, l’enjeu du roman, ni même l’intention des auteurs au cœur de notre futur récit. C’est tout à fait normal. Cette première semaine de défi n’est pas encore terminée. Je sais que certains d’entre vous aimeraient lire rapidement une de ces scènes prétexte dont je parle dans l’épisode 0 de notre défi « J’écris un roman en 3 mois… avec mon fils ».

Mais, contrairement à mes habitudes d’écriture, je m’engage à écrire un roman sur une très courte période et à en rendre compte chaque semaine au lecteur. On est loin du cliché de l’écrivain qui se retranche du monde, dans sa grotte, pour pondre son bouquin. Ce qui nous oblige à monter une structure dès les premiers jours, et c’est pas plus mal, ça nous évite de perdre un temps précieux. Alors, patience, les ami(e)s 🙂 Ça arrive ! Nous avons notre personnage retors (la nourrice), et notre personnage protéiforme, Sarah, incarnant une partie du mystère. C’est énorme ! Alors, je vous dis à lundi les amis lecteurs, co-écriteurs et curieux d’un jour !

Inventer une super-héroïne qui rivalise avec les géants américains...

Ça vous tente ?
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Naissance d’une super héroïne

J’écris un roman en 3 mois avec mon fils, épisode 1. Dès la première séance d’écriture, les objections fusent ! Et c’est comme ça qu’on met au monde une super héroïne qui marquera l’histoire du genre !

Salut tout le monde ! Je suis super contente de démarrer ce premier épisode de notre marathon « J’écris un roman en 3 mois… avec mon fils ». Vous allez voir que cette première séance d’écriture est remise à la page dès le premier débriefing avec Anton. En effet, à la lecture de ces premières idées de départ, des objections fusent et je les note en marge pour les intégrer à la séance du lendemain. Pour rappel, j’ai proposé à mon fils de 13 ans de participer à mon projet d’écrire un roman en trois mois sur le thème d’un enfant super hérosSi vous avez raté l’annonce de ce défi, je vous invite à lire mon article précédent où je partage ma méthode des 3 clés pour kiffer l’écriture de votre roman.

L’auteur a ses croyances que je ne saurais voir

l'auteur et ses héros
L'enfant est un conteur fascinant, photo AD_Images

Nous sommes le premier jour des vacances et, la veille, l’idée m’est apparue comme une évidence. J’avais fait part à Anton de mon inquiétude qu’il passe ses vacances sur la PlayStation. Il m’expliquait alors qu’il testait justement un nouveau jeu où il était un super héros, dans un scénario à la « heroes » (série culte contemporaine que je lui avais conseillé). Ça fait plus d’un an maintenant qu’Anton ne lit plus un bouquin. À 13 ans, l’influence parentale a largement perdu du terrain, et les sorties bibliothèque sont de l’histoire ancienne.

Anton avait commencé l’écriture d’une histoire de super héros qui l’a vite mené dans le cloître de la croyance limitante (voir ma vidéo où je parle de sa douloureuse expérience à la dixième minute) Bref, il accepte de participer au défi et, dès le lendemain matin, je lui fais un topo sur ma première séance de travail. Il m’arrête net quand je parle du père de Line. Non, ce dernier ne sera pas ce mec un peu paumé mais sympa, non ! Le père de Line est méchant, agressif, voire violent. Ce qui permettra à Line de s’opposer à lui et de partir sauver sa mère sans lui demander son avis. Mais ne brûlons pas les étapes. Voici, dans l’ordre, comment les choses se sont passées. 

Première séance d’écriture : l’histoire familiale

sous la tempête
Quels sont les pouvoirs d'un enfant sous les tempêtes familiales ? Dessin de AnalyseArt

Un couple au bord de la crise de nerfs

Line est une enfant de 5 ans qui présente des capacités, des super pouvoirs. Sa mère voit qu’il y a des trucs pas normaux. De plus en plus angoissée, elle ne supporte plus le déni de son mari et a même arrêté de travailler pour s’occuper exclusivement de Line. Malgré cela, son mari continuera de nier l’évidence au sujet de sa fille. Il pense que sa femme veut en faire une enfant à part, une surdouée. Pourtant, une amie de la famille, collègue du mari, est d’accord avec la mère : Line n’est pas une enfant comme les autres.

Qui est le mari ? Un informaticien, technicien du son et musicien à ses heures. Il travaille beaucoup mais ne gagne pas lourd. Souvent en déplacement, il tente d’arrondir les fins de mois en créant des sites internet. Mais, son kiff, c’est la musique. Il était DJ étant plus jeune. Elle, elle bossait comme infirmière psychiatrique, un dur métier. Malgré tout, elle adorait son job, elle restait cool et empathique. La situation lui met les nerfs à vif. Les disputes au sein du couple sont de plus en plus fréquentes.

Une enfant pas comme les autres

Bébé, Line était nerveuse. Elle se débrouillait mieux que les autres, tant physiquement que mentalement (capacités motrices et cognitives). Dans les jeux de cubes et autres manipulations, son kiff, c’est l’équilibre des objets, elle fait des assemblages qu’un enfant de son âge semble incapable d’élaborer. Pareil pour son équilibre corporel. Très tôt, elle synchronise ses mouvements et se tient debout à 6 mois.

Quand sa mère reprend le travail, la nourrice est inquiète. Line ne réagit pas comme les autres enfants. Elle ne supporte pas la maladresse des autres bambins, le désordre, la bouffe qu’ils étalent partout. Chaque objet ou aliment qui tombe provoque des crises, elle s’énerve et pleure jusqu’à ce qu’un adulte y remette de l’ordre, c’est flippant.  De plus, Line refuse de manger si elle ne tient pas le biberon toute seule, puis la cuillère. Rapidement, elle refuse les couches, et le pot est donc introduit très tôt. Elle crise en poussette et pour tout ce qui ne lui permet pas de maintenir son équilibre par elle-même.

Un événement tragique se prépare

Le père commence à s’inquiéter, mais il refuse que sa fille aille consulter un psy. En dépit de ses réticences, sa femme conduit Line chez différents spécialistes : une orthophoniste, une psychologue, une psychomotricienne, et même une sophrologue. Mais Line ne coopère pas du tout. À 3 ans, elle entre à l’école maternelle et c’est le carnage ! C’est à ce moment là que sa mère quitte son job à l’hôpital et que la situation va basculer. La première image qui m’est venue est une situation de crise. Une image choc est souvent celle qui fait tilt et qui nous dit : « Là, je tiens quelque chose ! ».

Le débriefing : des éléments clé de l’histoire

Line tornade de sable
"Line crée un tourbillon de sable super violent qu’elle ne maîtrise absolument pas"

Trouver l’origine d’un mystère

De retour de ma séance d’écriture, je lis tout ça à Anton. J’explique aussi que les parents se disputent de plus en plus, que la mère va craquer et quitter la maison, laissant sa fille seule avec son père. Il faut qu’on sache d’où viennent les super pouvoirs de Line. Sa mère est d’origine asiatique, adoptée à la naissance, elle ne connait rien de ses origines (évidemment faut bien un mystère à éclaircir et une histoire logique qui explique les pouvoirs de Line). Je pense que la mère est partie à la recherche de ses racines. Je pense aussi qu’après le départ de la mère, Line sera suivie par un psychiatre pas comme les autres, conseillé par une amie de la famille qui est au courant. Le père n’a pas le choix. Et puis, ce psychiatre est très spécial, il en sait plus qu’il ne veut bien l’avouer. Il pourrait secrètement être en communication avec la mère, qui se retrouve dans un village isolé, une île peut-être, où les gens cachent leurs pouvoirs. D’ailleurs, il existe encore quelques communautés isolées dans le monde. Paraît même qu’on les laisse tranquille pour ne pas leur refiler nos microbes. Enfin, ça, c’est une autre histoire…

Dès les premières lignes, les objections fusent

— Non ! Le père est méchant, dominateur et riche ! Si la mère disparaît, il lui faut de l’argent. Et si elle est en danger, Line voudra partir à sa recherche. Il faut qu’elle en ait les moyens quand même !

— Ok, ça se tient ! Mais ça demandera un peu plus de recherches. Si les parents étaient des gens comme nous, ça aurait été plus simple. S’ils sont riches… j’avais une scène en tête quand j’ai imaginé Line. La fillette est dans le bac à sable d’une aire de jeux, comme celle où j’allais quand vous étiez petits, et là, pour la première fois, la puissance de ses pouvoirs se manifeste. Elle crée un tourbillon de sable super violent qu’elle ne maîtrise absolument pas. Elle et les enfants qui l’entourent auraient pu y rester ! Sa mère arrive à l’en extirper et à calmer la fillette toute flippée. C’est cet épisode qui pousserait la mère à tout larguer et à laisser le père se débrouiller (c’est bien un fantasme de mère, ça !). Mais s’ils sont riches, l’environnement n’est pas le même. La mère n’est pas infirmière et, en plus,  ils ont des gens de maison.

L’apparition du mentor, la figure dominante

Le majordome ! D’accord, le père est un gros riche vraiment pas sympa, mais il y a Winston, le majordome ! Il est noir aux cheveux blancs. Calme, grand, rassurant et bien habillé. C’est le seul ami de Line, c’est lui qui va s’occuper d’elle quand sa mère sera partie.

— Ouais, super idée. En revanche, on n’est pas dans une série américaine, je ne suis pas sûre que l’élite française s’entoure de majordomes noirs et fidèles. Et puis, Winston est un nom britannique. Mais bon, on ne va pas s’embarrasser de détails pareils. L’important c’est surtout de déterminer comment les pouvoirs de Line se manifestent. Pour moi, tout est dans l’équilibre. Imagine-la à l’école et qu’elle maintienne sur sa table une barrière de crayons en équilibre. Regarde (je pause un crayon à la verticale), le crayon ne tient pas facilement debout, tu vois.

La force intérieure confrontée à la force sociale

— Imagine qu’elle en fasse une rangée de crayons devant elle, continuai-je.. Si quelqu’un se déplace et crée un mouvement d’air, elle le détourne sans s’en rendre compte pour maintenir les crayons en équilibre. Mais si quelqu’un vient à poser brusquement sa main sur la table, elle s’énerve. Dans la réalité, si nous étions témoins d’un tel phénomène, il y a peu de chances qu’on se dise : « cette fillette a des super pouvoirs ! ». Les adultes chercheraient plutôt à se débarrasser du problème en se focalisant sur les réactions disproportionnées de Line. La directrice de l’école convoquerait les parents, expliquant que Line est inadaptée au milieu scolaire.

Voilà comment ce premier épisode se termine. Au prochain épisode, nous nous attacherons à avancer sur la question suivante : comment se manifestent les pouvoirs de Line ? Elle possède des pouvoirs kinesthésiques, assurément. Mais comment fonctionnent-ils les premiers mois et les premières années de sa vie ?

Cette question centrale trouvera ses réponses au fil des semaines. Si vous avez des suggestions et des idées, n’hésitez pas à les proposer en commentaires ou directement en réponses par mail. Et comment les adultes peuvent gérer une enfant pareille ? Line ne supporte pas le désordre, la bouffe ou les objets qui tombent, elle a un besoin vital d’équilibrer son corps (voire son esprit) à l’espace qui l’entoure. Pas simple tout ça, et c’est bien l’intérêt. Une telle histoire ne manquera pas de piquant !

Deux épisodes par semaine sont prévus le lundi et le jeudi ! À très vite !

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Écrire votre roman : les 3 clés du succès

Vous désirez vous lancer dans l’écriture ? Écrire votre roman sans attendre ? Mais, vous pensez ne pas avoir assez d’éléments pour démarrer ? Découvrez les 3 clés indispensables pour entrer dans le jeu maintenant !

Vous désirez vous lancer dans l’écriture ? Écrire votre roman sans attendre ? Mais, vous pensez ne pas avoir assez d’éléments pour démarrer ? Grande erreur ! Vous n’avez même pas le prénom de votre héros ? Pff… Vous êtes indigne de commencer. D’ailleurs, vous avez une super idée de roman qui vous tient aux tripes mais vous devez d’abord élaborer un plan, puis un scénario, puis… STOP ! Écrire votre roman est une aventure ludique, et vous avez le droit d’entrer dans la partie avec les 3 règles clé que voici. Découvrez ces 3 clés du succès pour entrer dans le jeu dès maintenant ! Vous pourrez également suivre mon défi « écrire un roman en 3 mois… avec mon fils ». C’est tous les jours à partir de lundi prochain (28 octobre 2019). Je vous dis tout en bas de cet article.

Clé n°1 : commencez à écrire votre roman sans même connaître vos personnages

clé n°1 pour écrire un roman
La clé n°1 pour écrire votre roman - photo de Natan Bregalda

Vos séances d’écriture quotidiennes sont votre bouffée d’oxygène

Lancez-vous maintenant ! Les séances d’écriture dont je parle dans mon bonus sont indispensables à l’avancée de votre projet d’écrire un roman, pour vous tenir en haleine. Même si vous ne maîtrisez pas encore les tenants et les aboutissants de votre histoire, commencez à écrire votre roman sans attendre, sans même connaître vos personnages à fond (recevez immédiatement mon kit de démarrage ici – c’est cadeau !). Vous n’avez qu’une vague idée de ce qu’ils font dans la vie ? Vous ne savez même pas encore leur prénom ? Parfois, je colle un nom après une ou deux secondes de réflexion et je le remplace plus tard si besoin (le plus souvent celui qui vient sans réfléchir est le bon). Apprendre à écrire le souffle léger permet d’empiler un nombre invraisemblable d’idées saugrenues et de détails insignifiants, et fera de votre histoire un roman vivant.

Créez-vous un espace-temps protégé et intime

N’ayez pas peur de vous perdre dans une histoire confuse. Vos séances quotidiennes font partie d’un espace-temps spécial. Elles créent une bulle protégée à un moment précis de votre journée, un rendez-vous intime à ne pas rater.  Elles se démarquent des séances de travail dédiées à la structuration du roman. En séance d’écriture, je m’interdis de trop réfléchir. En effet, le jeu est toujours le même : on est dans le rythme de l’écriture sans peur ni reproche. Pas de pause, pas de jugement, pas d’hésitation. Par exemple, quand un mot m’échappe, j’écris le premier qui me vient, et je prends soin de le mettre entre parenthèses pour y revenir plus tard à la correction. Ne fournissez aucune excuse valable pour ne pas instaurer immédiatement votre séance d’écriture quotidienne. Comme l’exercice physique, la séance quotidienne maintient en forme l’écrivain que vous êtes. Cette séance (même de 10 ou 15 minutes par jour) fera de vous l’auteur de votre futur roman.

in love - écriture de poèmes
On est dans le rythme d'écriture sans peur ni reproche, photo emerloppez19

Vos temps de travail et de recherche seront plus dynamiques

Certains objecteront qu’une séance d’écriture est un temps de travail acharné. Katherine Pancole déclare qu’au cours de ses 5 heures de travail quotidien, elle est contente quand elle a pondu deux pages. Je ne parle pas de ces séances-là. La séance d’écriture est pour moi une bouffée d’oxygène qui fait circuler l’écriture dans le sang. Elle ne remplace pas les séances de travail où écriture et recherche se côtoient, où les questions s’empilent, se déchaînent et se décortiquent. Ce sont les temps de submersion qui nécessitent des réponses, obligent à rédiger, corriger, raisonner, critiquer, transformer, épurer, soupeser, remanier. Katherine Pancole illustre bien cette réalité à travers les dessins d’Anne Boudart que vous pouvez retrouver sur la page facebook de l’auteure.

Katherine Pancole
"les séances de travail où écriture et recherche se côtoient", dessin d'Anne Boudart

Clé n°2 : découvrez chaque personnage en les confrontant les uns aux autres

esquisse de personnage
"confrontez les frêles esquisses de vos personnages à des bouts de scènes intuitives", dessin de Mirzet

Esquissez vos personnages sans vous soucier du résultat final

Qui est mon héros ? Comment s’appelle-t-il ? Comment vais-je écrire un roman sans connaître tout de sa famille, de ses amis et de son passé ? Tant de questions se bousculent que vous risquez la surchauffe. Ainsi, si vous confrontez les frêles esquisses de vos personnages à des bouts de scènes intuitives, sans complexe, sans enjeu, sans travail acharné, juste par jeu. Les stratégies, les intrigues, les coups de théâtres, apparaîtront grâce à ce travail d’approche. Là, on apprivoise. Ainsi, vous élaborez, sans vous en rendre compte, le squelette de votre futur roman. Alors, la super intrigue qui vous trotte dans la tête prendra vie, dans la plus pure tradition de l’écrivain heureux.

Écrivez des petits bouts de vie sans vous soucier de leur cohérence

Connaissez-vous suffisamment votre héros pour vous lancer dans l’écriture ? Si vous vous posez encore la question après avoir débuté vos séances d’écriture, dites-vous bien qu’il vit un peu plus chaque jour grâce à vous. Qui est Mia, l’héroïne de mon roman en cours ? Eh bien, je sais qu’elle est belle, le teint caramel, les cheveux aériens et bouclés, les yeux noisette. J’ai élaboré au fil de mes séances un bon nombre d’éléments de sa vie et de son enfance. En somme, c’est comme inventer des petits bouts de vie ! Des dialogues entre personnages mal dégrossis, leurs pensées en arrière plan, leurs sentiments mal perçus ou à peine devinés, leur relation évidente ou leur rencontre fortuite, etc. De là, mes idées se confrontent en vrac ou, au contraire, elles se renforcent au fil des jours. C’est comme si Mia était dans son univers tandis que, moi, je le découvre.

communication de groupe
"Sans l’entourage du héros, il n’y a point de héros." image de Geralt

Créez votre héros à travers le regard des autres personnages

Mon héroïne Mia a un caractère que je ne saurais dépeindre tant que les autres personnages de sa vie ne m’auront pas avoué leurs sentiments. Écrire sur l’enfance de son père adoptif, écrire sur les sentiments de ce père pour sa fille, c’est créer un pan entier de la personnalité de mon héroïne. Sans l’entourage du héros, il n’y a point de héros. Même Robinson Crusoé a son acolyte : Vendredi. La caractérisation de votre personnage se construit au travers de ses traumatismes, de ses réactions face aux autres, de ses haines et de ses passions. Par exemple, son histoire intime explique ses réactions primaires dues aux traumatismes de l’enfance. C’est aussi et surtout le regard des autres qui détermine qui il est et ce qu’il accepte ou non de faire. Qu’est-ce que les autres pensent de lui ? Comment le considèrent-ils ? Que lui demandent-t-ils de faire ?

Pour en savoir plus sur la caractérisation des personnages je vous invite à écouter mon podcast « Comment créer des personnages vivants »

Clé n°3 : préparez-vous à percer les mystères de votre intention

La femme-écriture
"Pourquoi décide-t-elle de partir à l’aventure ? Que cherche-t-elle à se prouver ? J’établis une relation de cause à effet", création de Kellepics

Comment se construit l’écriture de votre roman ?

L’affaire se corse ! Notre héros est souvent le premier personnage que l’on a en tête, il incarne notre idée, notre message. Logique, c’est notre principal outil pour résoudre le conflit, l’enjeu de notre histoire. C’est alors que la question vous démange, celle qui pousse à sortir de l’écriture intuitive, de la zone confortable et douillette de vos séances d’écriture, et à élaborer la stratégie de votre roman : Quel conflit ? À quoi aspire profondément mon héros ? Qu’est-ce qu’il a le plus de mal à accomplir ? À quelle sauce va-t-il être mangé ? Et, enfin, comment va-t-il s’en sortir ? C’est donc là, à ce moment précis que vous devez faire le grand saut et passer en mode pro. Instaurer une plage horaire supplémentaire où l’écrivain insouciant que vous êtes se transforme en coureur de fond, doublé d’un impitoyable manipulateur.

Voir à ce sujet mon fameux article « Secrets d’écrivain enseignés par Derren Brown »

Comment créer le mystère de l’intrigue ?

Que va-t-il devenir ? Que va donc devenir votre héros ? Voilà la question fondamentale. L’importance des autres personnages apparaît alors. Car, en conséquence, que vont devenir les autres ? C’est une préoccupation constante chez votre héros, consciente ou non. Reprenons l’exemple de Mia. Elle se construit autour de sa relation avec Mirko, son père adoptif. Généralement, un héros se construit autour d’une figure dominante, tel un mentor. Ce dernier peut être absent, mais son influence reste dominante. Il cherchera d’autres figures-miroir pour le remplacer. Écrire le parcours du père et de Mia me permet de comprendre la nature exacte de leur relation et d’avancer dans la création d’un objectif de qualité : que cherche mon héroïne, au fond ? Son indépendance ? Pourquoi décide-t-elle de partir à l’aventure ? Que cherche-t-elle à se prouver ? J’établis une relation de cause à effet, je cherche à comprendre si elle fuit, si elle se positionne, si elle cherche à régler un conflit intérieur.

Écrire votre roman c’est en chercher la cohérence !

Ces mystères doivent être percés à jour par l’auteur. C’est pourquoi les va-et-vient entre vos séances d’écriture et votre travail de réflexion est une méthode que je conseille. Elle facilite l’avancée de votre projet. Lors de mes séances d’écriture, je teste des scènes-prétexte pour tester les réactions de mon héroïne. Une scène d’enfance, par exemple, me permet de tester ses capacités. Mia habite chez Flutura, la sœur de Mirko, qui vit dans un village de montagne avec son mari et son fils Milan. On voit les enfants se gaver de framboises, un panier vide à leurs pieds, quand trois gamins débarquent et proposent à Milan de venir chasser le serpent. Dans mon idée, Mia a appris énormément dans la forêt aux côtés de son grand père chamane, puis de Baka, la guérisseuse serbe. Mais, pour que le récit soit intéressant, Mia aura subi un traumatisme psychologique qui lui aura fait tout oublier. Ainsi, ses connaissances sont inconscientes et apparaissent de manière intempestive. Je veux la mettre en situation de réagir vite pour voir comment elle se perçoit elle-même face à la vie.

En résumé, l’auteur d’un roman est le créateur de l’univers !

Vous êtes le garant d’une intelligence supérieure

lettre secrète
"Les protagonistes doivent résoudre une énigme ou un conflit. Mais ce n’est pas gratuit ! " - photo de Pezibear

L’auteur est un incontestable maître du jeu, mais il n’a rien d’un Dieu. C’est plutôt le grand ordonnateur de la vie, celui qui crée les synchronicités, les événements qui poussent le héros à accomplir son destin. Il est à l’écoute, décode les intentions cachées qui poussent les personnages vers ce quelque part impalpable, indécodable pour eux. Ainsi, vous cernez la cohérence du « conflit » qui empêche le héros d’atteindre son but. Il est clairement attiré par quelque chose de plus grand que lui, une force invisible. C’est au fond de lui, quelque part, et vous l’avez compris.

Certes, vous êtes un manipulateur équivoque, mais nul ne sait mieux que vous ce qui est vital dans cette histoire, ce qui est vital pour tous les personnages en présence. Vous avez la mission de les guider vers leur destin, de les aider à écouter leur voix intérieure, vous avez la responsabilité d’être l’intelligence supérieure qui agence l’univers. Vous êtes le garant incontestable de la cohérence de la vie au sein de cet univers.

Gardez les 3 clés d’une écriture vivante

Clé n°1 : Jetez-vous dans l’écriture ! Lors de vos séances d’écriture, ne vous demandez pas si une scène est bonne. Nombre de scènes permettent de créer l’univers de vos personnages, même si elles ne se retrouvent pas forcément dans le roman. Elles ont le mérite de nous faire avancer dans sa construction, ne serait-ce qu’en y ajoutant plus de texture, de matière organique, plus de vie en clair.

Clé n°2 : Cela vous permet de tester l’ambiance, et aussi de choper des idées sur les réactions des uns et des autres. C’est ainsi qu’un personnage peut vous surprendre. Apprendre à mettre les personnages en situation, à chercher leurs repères, se fait aussi en lâchant prise lors de vos séances d’écriture. Vous y découvrirez de précieuses portes d’accès pour comprendre ce qu’ils cherchent vraiment.

Clé n°3 : Mettez en place les conditions matérielles et humaines qui poussent le héros vers un objectif sensé. La question du sens passe par l’étude des relations de cause à effet évoquées plus haut. Les protagonistes doivent résoudre une énigme ou un conflit. Mais ce n’est pas gratuit ! Cette quête les pousse immanquablement vers la révélation de qui ils sont vraiment.

La clé ultime pour réussir l’écriture de votre roman : votre course à l’objectif

C’est bien beau tout ça mais, concrètement, comment garder sa motivation ? Comment croire qu’on va vraiment y arriver ? Depuis que j’ai créé ce blog, il y a un an, j’ai lâché la course à l’objectif. Malheureusement, quand on veut écrire un roman, se fixer une date butoir est un incontournable. La nécessité de pénétrer l’univers de vos personnages devient une course contre la montre et vous transforme, vous aussi, en héros. Pour moi, pas de roman sans date butoir, ne serait-ce que pour entrer dans la course. Qu’on prolonge le délai imparti est une autre histoire.

J’ai donc décidé d’en faire la démonstration en live en me lançant le défi d’écrire un roman en trois mois… avec mon fils. C’est un roman très fun qui a pour thème l’enfant super-héros : Le Projet Line. Il démarre lundi ! Line va grandir mais, en attendant, comment un super héros se débrouille-t-il enfant, et bébé ? C’est la question à laquelle, mon fils et moi allons répondre sous vos yeux, en trois mois.

Le défi est lancé !

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Aldo, mon personnage joker

Comme promis, je vous présente le mec qui se raccroche aux branches, personnage secondaire clé de « La Main invisible ». Celui-ci est fou de prime abord, du moins dans son introduction dans le récit. Mais, comme expliqué dans mon article sur les personnages joker, ses actions auront un impact important dans les aventures de Mia.

Les premisses de l’écriture d’une scène clé : l’introduction d’un personnage

Comme promis, je vous présente le mec qui se raccroche aux branches (voir mon article sur le sujet), personnage secondaire clé de « La Main invisible ». Celui-ci est fou de prime abord, du moins dans son introduction dans le récit. Mais, comme expliqué dans mon article sur les personnages joker, ses actions auront un impact important dans les aventures de Mia. Je vous partage ici le premier jet de la rencontre entre Aldo et Mia, notre héroïne. Des prémisses à retravailler dans le détails, Les dialogues sont succins, donnant une ligne directrice sans prétention, dont la profondeur naîtra en temps voulu, quand les personnages auront trouvé leur incarnation.

Un texte à revisiter du point de vue des personnages :

Mia avait porté le projet amérindrien jusqu’à son terme grâce au soutien indéfectible de Mirko, mais sans la contribution d’Aldo, dit « le moine », l’ennemi serait parvenu à ses fins. Mia et Diulma rencontrèrent le moine au Brésil. Toutes deux s’accordaient une petite pause dans les environs de Belém, à l’embouchure de l’Amazone. Après une soirée bien arrosée avec une bande d’amis musiciens, elles flirtaient aux abords du bar, les pieds dans le sable, riant comme des adolescentes qu’elles étaient. Le moine arriva à grand renfort de cris et d’incantations pour leur « arracher leur ignorance». Ses gestes faisaient penser aux transes africaines des séances d’exorcisme. Elles auraient pu en rire si ses gesticulations ne transpiraient pas autant de peur. Il semblait effrayé par ses propres mouvements, comme si une force avait pris possession de lui. Mais les jeunes femmes restaient impassibles. Le regard rivé sur l’excentrique, elles se préparaient à son approche.

Une rencontre à remplir d’émotions du point de vue de Mia

singe femme Stefan Keller
l'expression d'une rencontre extraordinaire , création de Stefan Keller

Mia se sentit touchée par l’inconnu et s’en étonna. Pourquoi éprouvait-elle soudain de l’intérêt pour cet énergumène ? Il dégageait une tension presque surnaturelle. L’agressivité de ses gestes collait mal avec une certaine hardiesse dans l’expression de son visage. C’était de l’affliction. Diulma, quant à elle, se délectait sans joie du spectacle de son tourment. Néanmoins, toutes deux pressentaient que ce pauvre dévoyé venait à elles dans l’intention désespérée de communiquer, à la recherche d’une écoute compassionnelle. Dans un même élan, les filles prirent le parti de s’asseoir pour mater son incivilité. Elles étaient seules sur la plage. Les rares compagnons restés après la fête s’étaient rassemblés à l’intérieur du bar.

Arrivé à leur hauteur, l’individu cessa ses ânonnements rauques et déchirants qui n’avaient attiré l’attention de personne. L’homme finit par s’asseoir placidement face à elles, sur le sable sec. Dans un demi-silence, il ouvrit les lèvres pour ne rien dire. Il portait une tunique en toile de jute, à l’image qu’on se ferait d’un moine du Moyen Âge. Il emprisonnait ses doigts autour de la corde qui enroulait sa taille et les gratifiait d’une panoplie de mimiques faciales des plus saugrenues. C’était à la fois comique et tragique. Sur la défensive, Diulma et Mia ne pouvaient se permettre d’en rire. On aurait dit qu’il n’arrivait pas à se décider : exprimer sa fureur pour ce que le monde avait de plus laid, de plus vil et dangereux, ou leur exprimer son désarroi le plus profond. Il finit par s’immobiliser, les toisa un long moment pour les aborder finalement avec une certaine civilité.

Un dialogue de structure qui attend les fondements de sa vie

‒ Moi c’est Aldo, dit  le moine. Je reviens de la réserve d’Alto Nanay en Amazonie occidentale. J’étais chez les Indiens Pechico, reprit-il après une courte pause. J’ai parlé aux plantes. Elles m’ont parlé ! Les plantes. Je ne… Je vous assure que… je ne supporte plus… l’ignorance du monde. Je n’arrive plus à l’endurer. Je suis vraiment… perdu, j’ai envie que la mort me porte dans l’univers. Oui je rêve de mourir et de revenir. Chaque nuit je rêve de ma mort. Je veux tous vous tuer ! Pas vous ! se défendit-il bêtement. Les plus dangereux, surtout. Je voudrais tuer tous ces abrutis, ces gringos abuseurs, ces cannibales poilus ! Je veux anéantir ces massacreurs de beauté et d’âmes. Je… je sais qui vous êtes ! Vous êtes les rédemptrices ! Je vous cherchais, je vous espérais, je vous attendais mesdemoiselles, mes sauveuses. Qu’est-ce que vous faites là ?

‒ Moi, c’est Diulma, et elle, c’est Mia. Je suis née dans ce village et nous travaillons avec les Indiens du Para du Brésil mais nous sommes installées au Pérou.

‒ Nous travaillons avec eux à l’élaboration de programmes éducatifs bilingues pour qu’ils accèdent à nos connaissances en économie et en chimie, ajouta Mia avec décontraction.

‒ Ah, je vois, fit-il d’un air ironique, un sourire en biais. Vous êtes les nouveaux missionnaires du XXIème siècle. Des démons colonisateurs au visage d’ange.

Là, Mia éclata d’un rire franc et cristallin dont la blancheur rayonnait dans la pénombre. Riant toujours, elle enchaîna sur une douce dénégation :

‒ Ce sont eux, les Indiens, qui revendiquent ce changement. Nous, nous ne sommes que les anges répondant par miracle à leur appel.

Incrédule, Diulma se demandait pourquoi son amie révélait la nature de leur travail, par ailleurs si confidentiel, à ce pauvre égaré. Elle se retrouva totalement ahurie lorsque, contre toute attente, Mia demanda de but en blanc :

‒ Veux-tu être l’ange déchu qui sauve la planète ?

Aldo releva un peu plus le menton et la capuche de son uniforme glissa légèrement. Les lumières lointaines du bar révélaient un visage clair parsemé de taches de rousseur, et laissaient deviner une tignasse rouge et hirsute. Ses grosses lèvres ouvertes restaient en suspens. Il resta un instant dubitatif, fouillant des yeux le fond des prunelles sombres de son interlocutrice. Son regard fou s’éteignit, accueillit un éclair de lucidité qui détendit ses traits tirés comme sous l’influence d’une onde régénératrice. Son discours irrationnel ne perdit rien de son intensité mais son visage retrouva la belle douceur de celui d’un enfant.

Mes séances d’écriture sans structure m’ont menées à la création d’un monde à venir (accédez à mon bonus offert pour en savoir plus)

L'heure de la terre
La création de l'Amérindrie, "L'heure du monde" de Cristian Ibarra

Au bout d’un moment, Diulma se leva et les laissa causer dans la nuit chaude. Elle marcha vers une grande demeure, majestueuse bâtisse en bois délavé, lovée à quelques pas de la plage et monta l’escalier extérieur qui serpentait jusqu’au balcon sculpté. Elle entra nonchalamment par l’une des fenêtres du premier  et s’affala sur le lit. À son  réveil, Diulma les trouva assis au salon autour d’une tasse de thé. Ils causaient toujours mais, cette fois, Aldo usait d’une voix grave et suave qui n’avait rien de comparable avec l’intonation agressive et nasillarde de la veille. Elle salua Mia et partit déambuler jusqu’à l’entrée de ce qui ressemblait à une boulangerie. La boutique était une baraque surplombée d’un auvent qui abritait un four rustiquement aménagé dans un amas de briques et de terre. Une forte odeur de bois brûlé se mêlait à celle du pain. Lorsque Diulma revint avec le petit déjeuner, Mia lui annonça qu’Aldo prenait part à l’aventure.

Dès lors, Aldo arpenta le monde à leurs cotés, soutenant leur projet à bras le corps. Finalement, Mia eut le nez fin. Aldo joua un rôle crucial au sein de l’organisation. C’est avec un acharnement constant qu’il apprit pas moins de trente-huit langues amérindiennes. Instructeur en chef d’un régiment de traducteurs, Aldo devint la clé de voûte rassemblant et connectant plus d’une cinquantaine de tribus du Pérou et du Brésil, arbitrant dès le début la cohérence amérindrienne. Grâce à son travail, l’Alliance put assurer l’émergence de l’Etat Indépendant Amérindien en étant son principal financeur.