Mon atelier d’écriture avec Bernard Werber

Je suis allée à Paris pour rencontrer Bernard Werber à l’occasion de son atelier d’écriture. Autant dire que l’après-midi d’hier était magique

L'écrivaine solitaire à l'assaut de Paris
"Comment rester focus sur l'écriture de son roman sans se sentir trop seul(e) ?" Question posée à Bernard Werber Interview vidéo en bas de cet article Photo PitCrewProd

Salut tout le monde ! Je suis allée à Paris pour rencontrer Bernard Werber à l’occasion de son atelier d’écriture, un évènement gratuit organisé par Amazon Academy. Autant dire que l’après-midi d’hier était magique, sans pour autant revêtir la densité d’une master class telle qu’il le propose régulièrement sur son site rien que pour nous. Qu’importe ! Le jeu était délectable et Bernard Werber a encore fait la démonstration de son talent de meneur d’intrigues. Au fond, il rappelle astucieusement qu’entre l’écriture d’un roman et l’écriture d’une histoire, nous avons tout un monde à découvrir en nous, et dans notre rapport au monde. C’était l’enjeu de cet atelier d’écriture auquel j’assistais, émerveillée de tant de candeur et de simplicité. Et, pendant la pause, j’en profitais pour demander à Bernard ce qu’il conseillait pour rester focus sur l’écriture sans se sentir seul, isolé et lâcher la pression. Voir ma vidéo en bas de l’article.

Dans l’atelier d’écriture de Bernard Werber souffle le vent d’une liberté retrouvée

Bernard Werber Paris
"Un atelier avec Bernard Werber, ça vaut le détour. J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer un homme aussi libre !"

Un atelier avec Bernard Werber, ça vaut le détour. Vous bénéficiez alors d’une vraie récré, une récréation pour les grands enfants que nous sommes. On ne voit pas le temps passer, on oublie le monde extérieur, et on se laisse complètement happer par l’espace-temps des gens heureux. Bernard Werber est passé maître dans l’art de transformer la réalité en pur délice créatif. J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer un homme aussi libre !

Bernard Werber insuffle un vrai sentiment de légitimité

Dès les premières minutes, Bernard Werber nous transporte dans la beauté d’un jeu qui nous appartient tous, au-delà de nos convictions de n’être qu’une identité figée dans les différents rôles que nous nous attribuons. Il nous révèle à nous-mêmes, il fait émerger cette certitude enfouie que notre écriture est éloquente et légitime. Quelques images se succèdent à l’écran pour que nous en révélions l’histoire — une simple phrase à faire sonner, une histoire à elle seule, une image qui raconte un avant et un devenir. En quelques mots, ces illustrations nous interpellent, nous font rire, projettent une possible narration. C’est enfantin et efficace.

Premier commandement de cet atelier d’écriture : « arrêtez de vous juger ! »

Cette mise en bouche fonctionne à merveille et, tout du long, on se rassemble, on interagit, on crée et on s’exprime avec un naturel déconcertant. Le secret de cette liberté de parole écrite, clamée, partagée, tient aussi de sa mise en garde. Le mot « SPOKE » s’affiche à l’écran. « Ce que vous allez apprendre, vous servira tout le reste de votre vie. SPOKE est un mot grec qui signifie : travailler sans se juger. Voilà ce que nous allons faire aujourd’hui. Arrêter de se juger ! Nous sommes des machines à juger et, au final, nous nous jugeons nous-mêmes. C’est ce processus-là qui nous empêche d’écrire. Pour écrire, vous allez éteindre votre mental et découvrir la joie d’être créatif. On est là pour s’amuser, soyez réactifs ! »

Deuxième commandement de cet atelier d’écriture : « écrivez sans réfléchir ! »

Comme tout homo-écriturus qui se respecte, nous connaissons forcément le premier secret de l’écriture : « se laisser aller à écrire sans réfléchir comme un cheval qui galope ». Cette liberté, nous l’avons découverte, un jour, puis oubliée ou enfouies dans l’inacceptable. Car, malheureusement, la notion de risque et d’erreur nous est devenue insupportable, au point de brimer notre audace. « Surtout, ne vous arrêtez pas pour vous dire : merde j’écris des conneries ! Écrivez librement, n’importe quoi, sans réfléchir et sans vous arrêter. Soyez libre ! » Acceptons donc de tout réapprendre pour recouvrer notre liberté. Et le plus drôle dans tout ça, c’est que ça ne demande pas tant d’effort.

Dans  l’atelier d’écriture de Bernard Werber l’eau qui dort se réveille limpide

la parole se déroule
"Vous connaissez quelqu’un qui prend plaisir à faire chier les autres ? Qui aime vraiment ça ? Quelqu’un a-t-il rencontré une personne comme ça ? "

Des petites annonces loufoques sont prises en exemple, des faits divers, des plaques professionnelles photographiées sur un mur d’immeubles… nous confirment que « le réel dépasse l’imaginaire ! » On y puise un nombre fabuleux d’histoires complètes. Mais ce n’est pas tout ! Les heures s’enchaînent sans qu’on y prenne garde et Bernard amène les sujets du vécu, ces drames qui dépassent la fiction. Et voilà comment l’auteur de « Les Fourmis » et aujourd’hui « Sa Majesté des chats » nous entraîne sur son sillage.

Dans l’atelier d’écriture de Bernard Werber les résistances se délitent

« Écrire est plus facile que vous ne l’imaginez » claironnait-il en préambule. Rien ne vous oblige à pondre un manuscrit, écrire peut être un hobby. Sous-entendu : ne vous en privez pas ! Je me demande alors combien de fois nous aurons besoin d’entendre qu’on est tous capables d’inventer des histoires ? Nous avons ça dans la peau ! Et, sous prétexte que l’écriture proprement dite exige une certaine rigueur, nous ne serions pas capables d’en approcher la beauté ? Au fond, c’est peut-être ça qui nous dissuade d’écrire en toute liberté. Bernard Werber a vraiment le chic pour nous ôter toute résistance. Il semble que nous ayons intégré les deux préalables. À savoir : apprécier le processus d’écriture sans se juger et, en conséquence, apprécier ce qu’on écrit.

 L’écriture est un jeu d’idées choc d’où jaillit la clarté

À chaque exercice d’écriture, une consigne nous est donnée, un temps nous est imparti et une musique nous accompagne. Le truc qui nous rassemble c’est le thème de départ : « Trouvez un mauvais sujet de roman ». Les idées les plus inappropriées fusent. Les cornichons sont adoptés à la grande majorité, reléguant les hémorroïdes et les pieds qui puent au domaine des sujets par trop ragoûtants. Une fois la « promotion cornichon » auto-proclamée, les réjouissances se poursuivirent autour du cornichon : histoires d’amour courtes, histoire qui fait peur,… Nous avons joué le rôle de l’écrivain sans peur et sans reproche auquel je crois plus que tout. Le pied total !

Bernard Werber nous enseigne la beauté simple de notre incongruité

Bernard Werber ne fera pas l’impasse sur les règles essentielles qui mènent une histoire à son terme. Ce qui fait un héros ou une héroïne, explique-t-il, c’est qu’il cherche à savoir qui il est vraiment. Parce que les autres ne savent pas mieux que vous qui vous êtes. Alors, pour rendre son personnage vivant, il doit relever un challenge. Et, plus le challenge est difficile, plus le héros sera méritant. Ensuite, vous devez trouver une stratégie originale. Le héros est face à un dilemme et ne fait pas vraiment ce qui est logique. C’est pour ça qu’il est intéressant. Pour illustrer son propos, s’affiche à l’écran une liste de choses à faire pour perdre 5 kilos suivie avec une recette de fondant au chocolat. On rit, c’est en effet simple à comprendre.

L’atelier d’écriture de Bernard Werber est un ballet de personnages masqués

atelier d'écriture bernard Werber
"Le méchant dynamise le récit. Il introduit le mystère et révèle le héros"

« Faites un pas de côté pour éviter le crachat »

Comme cet atelier d’écriture ne durait que quatre heures, il fallait un sacré talent pour le rendre à la fois productif, créatif, interactif et instructif.  « Les gens racontent des conneries, vous les portez, les accouchez et pouf ! Ça fait un livre. Vous connaissez quelqu’un qui prend plaisir à faire chier les autres ? Qui aime vraiment ça ? » Quelqu’un a-t-il rencontré une personne comme ça ? La plupart du temps c’est notre cerveau limbique qui réagit et on se demande « pourquoi moi ? ». Mais si vous faites un pas de côté pour ne pas recevoir le crachat et que vous observez cette personne, ses mécanismes de pensée, vous disposez d’un personnage à exploiter. Vous procédez à une métabolisation par l’écriture. Allez ! Racontez-moi une histoire avec quelqu’un de très méchant.

« Regardez votre voisin dans les yeux pendant 20 secondes »

Le méchant dynamise le récit. Il introduit le mystère et révèle le héros, il le met face à lui-même. Nous disposons de trois mécanismes principaux : la recherche de sécurité, les automatismes émotionnels et la logique. Le héros subit une injustice de la part du méchant et finit par comprendre et par se venger. Ce principe marche à tous les coups. Après ces explications, retour aux exercices avec la création d’une fiche personnage, mais pas n’importe laquelle. L’exercice consiste à regarder son voisin dans les yeux, puis à bien l’observer avant d’en faire une fiche personnage : qualité principale, défaut majeur, relation avec son père, sa mère, plat préféré. A-t-il déjà volé, s’est-il battu, saoulé au point de rouler sous la table ? « Vous ne devez pas vous connaître. Est-ce que vous vous êtes parlé avant ? Non ? Parfait, alors c’est parti ! »

Sentez la puissance subtile de cet exercice !

Mon voisin est un concepteur de jeux de société qui s’est lancé dans l’entrepreneuriat. Qualité : entrepreneur. Ça, j’avais bon car j’avais triché, l’ayant vu faire ses comptes avant le démarrage de l’atelier. Ensuite, j’ai eu à peu  près tout faux. Lui s’est nettement mieux débrouillé mais, je suis assez transparente dans mon attitude, ça a dû l’aider. Bref, c’est un exercice d’une grande puissance pour approcher la création d’un personnage et comprendre que l’observation est une technique subtile de questions/déductions. Bernard Werber avouait qu’au début de sa carrière il associait systématiquement la photo d’un acteur ou d’une personne réelle à sa fiche personnage.

Cet atelier d’écriture résonnera encore longtemps en moi

le ballet masqué atelier d'écriture Paris
"le « manuscrit », un organisme vivant dont le squelette est essentiel, dont les organes représentent les plus belles scènes."

Comment nourrir son inspiration sans être hanté par l’irrationnel ?

Ainsi se termine pour moi cette bulle d’inspiration temporelle car je devais retrouver le tic tac de l’horloge qui annonçait le départ de mon train à destination du Havre. J’ai juste le temps de l’entendre personnifier le « manuscrit », un organisme vivant dont le squelette est essentiel, dont les organes représentent les plus belles scènes. Sans plan, prévient-il, on aura tendance à tricher, à s’empêtrer dans la surenchère, voire à basculer dans l’irrationnel pour parvenir à trouver une fin à la mesure de son début prometteur. Ça, ce n’est pas faux, c’est même intelligemment décrit : la hantise d’une fin qui nous échappe ! Bref, Un roman, c’est : « un début, un milieu, une fin, trois parties de même puissance, toutes d’égale importance ». Voilà qui clôture bien ma séance et résonne avec le coup de sifflet qui annonce mon départ.

Ma question à Bernard Werber : comment écrire un roman sans se sentir trop seul ?

Tout écrivain qui souhaiterait organiser un atelier d’écriture devrait participer à une master class de Bernard Werber ! Il rappelait que plus de la moitié d’entre nous, français, avons déjà songé à écrire un livre. N’est-ce pas ? Pourtant, nous ne serions que 3 % à posséder un manuscrit achevé et prêt à être offert à la lecture. C’est inadmissible ! Je pense que l’homme généreux et enthousiaste qui se tenait devant moi est bien résolu à faire bouger les choses et je suis bien décidée à le suivre sur ce terrain. J’ai emporté avec moi un petit souvenir. Pendant la pause, je lui ai proposé de répondre à une question qui vous intéressera, un petit souvenir vidéo de ma rencontre avec Bernard Werber juste en-dessous.

Comment faire de l’écriture un vecteur d’expression de la vie ?

Mais, attention les amis ! L’écriture n’est peut-être pas le seul vecteur d’expression qui vous correspond. Ce besoin viscéral que nous avons d’exprimer ce que nous sommes, et ce qui, sans le moindre doute,  nous donne le sentiment de répondre à la vie, se trouve quelque part entre la parole et l’écoute, entre le silence et le souffle, entre le mouvement et l’émotion. Nous recherchons parfois toute notre vie cette légitimité d’être en vie, qui ressurgit quand on écrit, et sème le doute. Expérimentez dans l’écriture, la danse, le sport, l’art ou les voyages ce quelque chose qui est en vous, qui cherche à savoir qui vous êtes et ce qui est vraiment important pour vous. Pourquoi ? Mais parce que vous êtes le héros de votre vie et que vous êtes le seul à pouvoir découvrir. Comme le rappelle Bernard, « les autres ne savent pas mieux que vous qui vous êtes ».

Souvenir vidéo : question à Bernard Werber

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